Théodore GUDIN (1802-1880)
Naufrage, 1831
Aquarelle et gouache sur papier
20,7 x 34,5 cm
Signé et daté en bas à droite Gudin 1831
Vendu
Depuis sa prime jeunesse, Théodore Gudin a toujours été fasciné par la mer. Alors que son frère aîné Jean-Louis se lance dans une carrière artistique et intègre successive- ment les ateliers d’Horace Vernet puis de Anne-Louis Gi- rodet, Théodore entre à l’École navale et voyage jusqu’en Amérique. Mais, abandonnant rapidement ses premières as- pirations, il rejoint l’atelier de Girodet sur les traces de son frère. Dès 1821, Gudin se rend en Angleterre en compagnie du peintre Eugène Isabey avec lequel il partage une véritable fascination pour la mer. À Londres, les peintures de Turner qu’il découvre ont une forte influence sur son œuvre. En se spécialisant dans la peinture de marine, Théodore parvient à associer sa passion de jeunesse et son métier de peintre. En 1822, il participe pour la première fois au Salon avec cinq toiles qui connaissent un certain succès. Le 4 mars de l’année suivante, un épisode traumatisant va profondément marquer sa manière de peindre. Alors qu’il navigue sur la Seine en compagnie de son frère, le frêle canot qui leur sert d’atelier flottant se retourne. Jean-Louis ne sait pas nager et se noie sous les yeux de Théodore. Dès lors, la mer ne sera plus pour le peintre que l’objet d’une fascination tragique.
En 1830, Gudin traverse la Méditerranée et participe à l’expédition d’Alger. Une aquarelle datée de l’année suivant son retour atteste de l’influence de ce voyage sur sa palette. Depuis la plage, le spectateur assiste au naufrage de deux grands voiliers pris au piège dans une mer déchaînée. Les vagues qui font danser les deux navires balancés sur l’écume produisent l’effet d’un ballet à l’issue terri ante. Le ciel large aux tons orangés occupe la moitié supérieure de la feuille et s’ouvre sur un lointain bleuté, rayé de maigres filets rouge vif. La mer, claire et laiteuse, contraste avec le brun ocré de la plage où quelques rares plantes sont secouées par le vent. Avec Gudin l’horreur s’associe au sublime.
Nommé peintre de la Marine en 1830 par le roi Louis-Phi- lippe, Théodore Gudin reçoit la commande prestigieuse de quatre-vingt-dix tableaux destinés au musée de Versailles pour commémorer le souvenir des grands épisodes de l’histoire navale française. Proche de la famille d’Orléans, il fut nommé baron puis reçut la Légion d’honneur en 1841. Trois ans plus tard, il épouse en secondes noces la filleule du roi, Louise Margaret Gordon Hay, lle d’un général anglais. Dès lors, le peintre partage sa vie entre la France et l’Angleterre. Il parvient malgré les changements de régime à ne jamais s’éloigner du pouvoir et reçoit de nombreuses commandes sous le Second Empire. En 1864, il œuvre à la création de la Société centrale de sauvetage des naufragés en souvenir de la mort de son frère quarante ans plus tôt.