Alexandre LAEMLEIN (1813-1871)
Orphée, 1866
Pierre noire, encre et gouache blanche sur papier
24 x 40 cm
Signé en bas à droite LAEMLEIN
Le thème d’Orphée charmant les animaux est récurrent dans l’histoire de l’art depuis l’antiquité. Dans la mythologie, Orphée est décrit comme un poète talentueux et un musicien virtuose. Le dieu Apollon, découvrant ses dons précoces, lui offrit sa lyre à sept cordes. Les neuf muses lui apprirent à en jouer, et en leur honneur, le jeune homme ajouta deux cordes supplémentaires à son instrument. Son chant était réputé si beau qu’il charmait les hommes, apaisait les bêtes féroces et faisait danser les plantes et les rochers qui s’animaient pour le suivre.
Pour son tableau du Salon de 1866, le peintre Alexandre Laemlein, d’origine bavaroise, choisit d’interpréter, à son tour, ce sujet si souvent illustré. Installé sur une large pierre, au pied d’un arbre, le beau poète caresse les cordes de sa lyre. Autour de lui, hommes, femmes, vieillards et enfants écoutent son chant mélodieux, mêlés aux animaux sauvages. Les plus féroces, le lion et le tigre se tiennent près de lui, attentifs ; dans une mare, un cygne et une tortue tendent le cou pour ne rien perdre de la musique ; dominés par un aigle en vol, un éléphant et un chameau s’approchent sans effrayer l’auditoire. L’œuvre de grandes dimensions séduira le public en son temps et sera acquise par le ministère de la Maison de l’Empereur et des beaux-arts. À ce titre, elle sera photographiée pendant son exposition avant d’être déposée par l’État au musée d’Aurillac deux ans plus tard. L’œuvre qui n’est plus exposée aujourd’hui est très endommagée. Le dessin qui lui est préparatoire ne montre que peu d’écart avec la composition définitive. Laemlein choisit d’ouvrir le quart supérieur droit en retirant le deuxième arbre qui cède finalement sa place à l’aigle en vol et quelques figures se déplacent sans modifier pour autant l’esprit général. La différence la plus frappante est cependant d’ordre stylistique. Si la peinture répond aux critères académiques et même encore néo-classiques (hérités de ses maîtres Jean-Baptiste Regnault et François-Édouard Picot), le dessin, par son caractère évanescent et par l’utilisation de la pierre noire mêlée à la craie blanche, évoque les plus belles pages de Pierre-Paul Prud’hon. Il gagne également des accents symbolistes qui le rapprochent des œuvres de Puvis de Chavannes ou de Gustave Moreau, ses contemporains.