François-Nicolas CHIFFLART (1825-1901)

Les Journées de mai, 1871
Huile sur toile
62 x 107 cm
Signé du monogramme F.C en bas à droite
Titré au revers au crayon bleu : Paris, mai 1871
Contresigné ou annoté au revers François Chifflart
Provenance : collection Georges Hartmann (1847-1940), sa marque de collection au revers (Lugt L.1243a) ; collection particulière, Biarritz

En cours d’acquisition par le musée Carnavalet

Durant la nuit du mardi 23 mai 1871, Paris s’enflamme. Depuis le dimanche précédent vient de débuter « la semaine sanglante », période la plus violente et dernier acte de la Commune de Paris. L’insurrection populaire des Parisiens qui re- fusent la capitulation française face à Bismarck est écrasée dans le sang par les armées versaillaises. Acculés, quelques communards équipés de chariots de poudre, d’essence et de goudron, décident de détruire par les flammes les symboles du pouvoir. De part et d’autre de la Seine, ils mettent le feu au palais des Tuileries et au palais d’Orsay où siège la Cour des comptes. L’incendie qui dure trois jours et trois nuits ne laisse qu’un tas de cendres et de ruines. Présent à Paris pendant la Commune, François Chifflart est témoin des évènements.

Cet artiste est probablement le seul lauréat du Prix de Rome à ne pas avoir connu de véritable carrière académique. Né à Saint-Omer en 1825, il reçoit ses premières leçons de son père, serrurier et graveur, avant d’intégrer l’atelier de Léon Cogniet à l’École des Beaux-Arts de Paris. Sous la di- rection de ce dernier, il remporte le Prix de Rome en 1851 et se rend en Italie comme pensionnaire de la Villa Médicis. De retour en France, l’artiste est rapidement mis à l’écart pour ses prises de position politiques. Ouvertement opposé à Napoléon III, il ne reçoit pas de commandes publiques et survit grâce au soutien de son beau-frère, Alfred Cadart, qui publie ses premières gravures. En 1871, alors qu’il assiste aux incendies spectaculaires qui embrasent la capitale pendant « la semaine sanglante», l’artiste décide de fixer sur le papier les images fortes des évènements. Dès le mois de juin, plusieurs de ses dessins sont gravés par Auguste Joliet et reproduits dans Le Monde illustré. Le 7 octobre de la même année, le journal publie sur une double page une planche titrée Les Nuits de mai. L’œuvre montre le palais des Tuileries et celui d’Orsay, en flammes, vus depuis le pont de la Concorde. Cette vision des incendies en noir et blanc est qualifiée de « chef-d’œuvre de la gravure contemporaine». Une toile inédite de Chifflart reprend avec de légères variantes cette composition. De grand format, l’œuvre dans laquelle le rouge sang des flammes remplace le blanc des fumées nocturnes est tracée avec la rapidité d’un instantané. D’une modernité évidente dans son traitement, cette peinture montre l’influence sur son auteur des visions d’incendies peintes par Hubert Robert ou Pierre-Antoine Demachy à la fin du siècle précédent.

François Chifflart apparaît aujourd’hui comme l’un des artistes les plus singuliers de son temps. Proche de Victor Hugo, pour lequel il illustra plusieurs ouvrages dont Les Travailleurs de la mer et Notre-Dame de Paris, l’artiste put compter sur le soutien de Charles Baudelaire et Théophile Gautier.

Retour en haut