Jules LAURE (1806-1861)

Vendu

Portrait de Monsieur Dumas, 1830
Huile sur toile
116 x 89,5 cm
Localisé, daté et signé sur la lettre :
Paris, Le 15 juin 1830 – Mon cher Dumas […] Jules Laure 

Vendu

L’élégant modèle de ce portrait typiquement ingresque porte une grande veste noire à col pourpre ajustée sur une chemise blanche. Il s’appuie légèrement sur une table d’appoint recouverte d’une draperie. Posé sur une console, on peut voir un livre fermé sans mention visible ainsi qu’une partition pour violoncelle titrée en italien. Il tient dans sa main, serrée entre ses doigts, une lettre qui, bien que peu lisible, nous apporte plusieurs informations. Rédigée à Paris le 15 juin 1830, elle est adressée au modèle, Mon cher Dumas. Le texte lui-même semble débuter par Je t’informe mais le reste du contenu, difficile à déchiffrer, laisse simplement apparaître la mention d’une ville : Lyon. La missive se termine par la formule affectueuse « Tout à toi », suivie de la signature de l’auteur Jules Laure.

Fils d’un agent forestier de la marine, Jules Laure est né à Grenoble en 1806. Avant l’âge de quinze ans, il intègre l’atelier du peintre Louis Hersent à Paris et s’inscrit à l’École des Beaux-Arts. Lorsque Jean-Auguste-Dominique Ingres, de retour d’Italie, décide d’ouvrir un atelier pour recevoir des élèves, le jeune homme ne tarde pas à le suivre et rejoint quelques-uns de ses disciples les plus célèbres : Amaury-Du- val, Alexandre Desgoffe, Jules Ziegler, ainsi que les Lyonnais, Paul et Hippolyte Flandrin. À l’époque de ce portrait, Jules Laure n’a que vingt-quatre ans et son modèle ne paraît guère plus âgé. La présence de la lettre dans le tableau et son ton très amical laissent supposer que les deux jeunes hommes se connaissent bien et s’apprécient. Le nom de Dumas est des plus communs en France. Quelques porteurs de ce patronyme sont déjà célèbres en 1830, tel l’écrivain Alexandre Du- mas, mais aucun ne semble pouvoir être associé au modèle qui pose devant nous. La référence à la ville de Lyon aurait pu permettre d’évoquer le peintre Michel Dumas, futur élève d’Ingres qui n’avait que dix-huit ans au moment de la réalisa- tion de cette œuvre. L’autoportrait de cet artiste, plus tardif, ne présente cependant aucune ressemblance avec le modèle de Jules Laure. Une seule certitude demeure donc : ce cher Dumas était élégant et aimait le violoncelle…

L’année de ce portrait, Jules Laure quitte la France en di- rection de l’Italie. À son retour en 1834, il expose pour la première fois au Salon et devient rapidement un portraitiste recherché. Depuis le début des années 1830, Laure avait adhéré au saint-simonisme, un courant de pensée politique et spirituel à tendance « socialiste ». Au sein de ce mouvement, il se lie d’une profonde et durable amitié avec Flora Tristan, femme de lettres fantasque à la vie romanesque. Flora partageait les idéaux politiques de Jules Laure et fut l’une des figures majeures du débat social des années 1840.