Attribué à Jean Victor SCHNETZ (1787-1870)
Portrait du graveur François Forster (1790-1872), vers 1817-1818
Huile sur papier marouflé sur toile
61 × 49 cm
Vendu
Ce portrait peint à l’huile, sur papier, représente un jeune homme élégant, le visage de profil regardant vers la droite. Son buste se détache sur un fond de paysage dominé par un ciel dont la noirceur annonce l’orage. Fermé sur la gauche par la haute façade du Palazzo Senatorio de Rome et sur la droite par quelques pins secoués par le vent, le décor se veut ténébreux. Le costume, composé d’un épais manteau bleu, d’un gilet jaune et d’une chemise blanche fermée au col par un foulard noué, est typique de la mode vestimentaire du premier quart du xixe siècle. Un carton à dessin empli de feuilles blanches, ajouté par le peintre sous le bras du modèle, atteste de son statut d’artiste. Grâce à deux portraits dessinés au début des années 1820, l’un par Guenin, l’autre par Ingres, il est possible d’identifier le modèle comme étant probablement le graveur François Forster.
Né au Locle en Suisse en 1790, François Forster commence par se former dans les célèbres ateliers d’horlogerie du canton de Neuchâtel. À quinze ans, il se rend à Paris pour apprendre l’art de la gravure en taille-douce auprès de Louis Pauquet et de Pierre Gabriel Langlois tout en fréquentant l’atelier du peintre Anne Louis Girodet. Inscrit à l’École des beaux-arts avec son compatriote Léopold Robert, Forster se fait rapidement remarquer et reçoit de nombreuses récompenses jusqu’à l’obtention du grand prix de gravure en 1814. Lauréat, il aurait dû partir pour Rome comme pensionnaire de la Villa Médicis, mais la chute de l’Empire, qui rend au canton de Neuchâtel son indépendance, lui faire perdre la nationalité française et par voie de conséquence le financement de son voyage. Grâce à l’intervention du roi de Prusse, Frédéric-Guillaume III, Forster se voit octroyer une pension de deux années pour visiter l’Italie. Arrivé à Rome en 1816, il fait la connaissance de Jean Auguste Dominique Ingres et fréquente la communauté des jeunes peintres francophones séjournant dans la Ville éternelle. À partir de 1817 sont présents dans la capitale Théodore Géricault, François Joseph Navez ou encore Jean Victor Schnetz. Ce dernier, ancien élève de David à Paris, montre dans ses œuvres de jeunesse une tendance à vouloir associer l’académisme néoclassique de son enseignement avec le naturalisme brut du préromantisme dont Géricault est le porte-flambeau en Italie. La touche épaisse et rapide du portrait de Forster, le traitement sans concession du visage ainsi que le caractère déjà romantique de l’arrière-plan sont en tous points comparables avec les œuvres de Jean Victor Schnetz en Italie lors de son premier séjour, à l’exemple du portrait de moine franciscain acquis en 2003 par le musée du château de Flers.
Tous les artistes séjournant à Rome au xixe siècle se sont employés à se portraiturer les uns les autres, par tradition lorsqu’ils étaient pensionnaires de la Villa Médicis, ou tout simplement en gage d’amitié, comme ici pour Schnetz vis-à-vis de Forster.