Irma MARTIN (1814-1876)

Vendu

Ondine donne à son mari le baiser qui doit le faire mourir, 1842
Huile sur toile 
71 × 58 cm 
Signé en bas à gauche Irma Martin
Expositions : Paris, Salon de 1842, no 1332 : Ondine donne à son époux le baiser qui doit le faire mourir ; Boulogne-sur-Mer, salon de 1845, no 295 : idem

Vendu

Artiste d’origine lyonnaise formée dans l’atelier du peintre Charles Steuben, Irma Martin propose pour sa participation au Salon de 1842 une toile inspirée par une obscure et terrifiante légende. Titrée Ondine donne à son mari le baiser qui doit le faire mourir, l’œuvre s’inspire d’un conte allemand écrit par Friedrich de La Motte-Fouqué en 1811 et traduit en français à plusieurs reprises dès 1818. Une version illustrée du texte est même publiée à Paris en 1832. Mlle Martin choisit de préciser son sujet en faisant imprimer au livret un extrait du conte : 

«Ondine était une fille des eaux qui ne pouvait acquérir une âme que si elle était aimée et épousée par un mortel.
Ce fut au chevalier Huldbrand qu’elle dut ce présent céleste
; comme il ne lui resta pas toujours fidèle, Ondine, suivant son destin, retourna sous les eaux.
D’après la loi des Ondins elle devait faire périr son époux s’il contractait un nouveau mariage.
Huldbrand épousa Bertha, et au moment où il allait se rendre auprès
 d’elle, Ondine apparaît voilée au chevalier.
“Ô mon bien aimé, dit-elle, ta dernière heure a sonné
! Laisse-moi te voir encore, ma chère Ondine, s’écria-t-il, si tu as le choix de mon supplice fais-moi mourir par un baiser.”
Elle souleva son voile, et déposa un baiser céleste sur le front de son époux, et leurs âmes ne tardèrent pas à se réunir pour
ne se séparer jamais.
»

Irma Martin représente la belle Ondine debout soulevant son voile blanc pour déposer un baiser sur le front de Huldbrand dont le teint livide annonce la mort imminente. Les costumes et le mobilier d’inspiration Renaissance placent l’œuvre dans le champ de la peinture troubadour tardive. Le décor à l’arrière-plan, telle une toile de fond de scène de théâtre, se compose d’un lac et de montagnes plongés dans une nuit bleutée, éclairés par la lune. Certains pourront y voir une référence aux maîtres du paysage romantique allemand Caspar David Friedrich ou Carl Gustav Carus ; d’autres décèleront la probable influence des dioramas de Louis Daguerre et Charles-Marie Bouton, qui, à cette époque, donnaient vie à de grandes toiles par de savants jeux d’éclairage. Irma Martin n’est pas la seule femme à aborder ce thème au Salon de 1842. Son amie Anna Rimbaut-Borrel y présente en effet une toile de même sujet. Il est surprenant de constater que cette légende d’une épouse trompée donnant la mort à son mari infidèle ait été presque exclusivement traitée par des femmes artistes. Déjà en 1831, une certaine Mme Pagès avait exposé une Ondine, suivie en 1838 par Adrienne Duport. Quelques années plus tard, Irma Martin, qui a conservé sa toile, la présente une nouvelle fois à l’occasion du salon de Boulogne-sur-Mer de 1845. Tout au long de sa carrière, l’artiste n’exposa pas moins d’une cinquante de toiles aux salons de Paris et de province, en abordant des sujets aussi variés qu’ambitieux.