Henri Joseph HARPIGNIES (1819-1916) 

Vue de Paris pendant les travaux du baron Haussmann, vers 1855-1860
Aquarelle sur papier
12 x 16,5 cm 
Signé en bas à gauche H Harpignies
Localisé en bas à droite Paris 

Président de la République depuis 1848, Louis-Napoléon Bonaparte devient empereur le 2 décembre 1852. Marqué par son exil londonien durant lequel il a pu découvrir les avantages d’une capitale moderne déjà transformée par la révolution industrielle, il décide d’engager d’énormes travaux à Paris et déclare : « Paris est bien le cœur de la France ; mettons tous nos efforts à embellir cette grande cité, à améliorer le sort de ses habitants. Ouvrons de nouvelles rues, assainissons les quartiers populaires qui manquent d’air et de jour, et que la lumière bienfaisante du soleil pénètre partout dans nos murs ». Pour l’aider dans cette tâche, Napoléon III fait appel à Georges Eugène Haussmann qu’il nomme préfet de la Seine en 1853 avec pour mission « d’aérer, unifier et embellir la ville ». Jusqu’à son départ en 1870, le baron Haussmann va organiser la destruction de vingt mille logements, souvent insalubres, pour en construire plus de quarante mille sur de nouveaux grands axes reliés aux égouts et équipés de conduites d’eau et de gaz. Plus de 95 kilomètres de rues pavées ou recouvertes de macadam sont créés dans le centre de la ville et voient leur largeur moyenne doublée en passant de 12 à 24 mètres. Des places gigantesques relient les boulevards entre eux et de nouveaux monuments surgissent du sol. 

Cette vision d’un Paris éventré attire le regard des photographes comme Charles Marville ou celui des peintres qui assistent avec nostalgie ou fascination à ces travaux. Henri Harpignies qui revient dans la capitale en 1852, après un séjour de deux ans en Italie, découvre les tranchées et les premiers immeubles effondrés. Installé sur une butte de terre et équipé de son matériel d’aquarelliste, il se place dans la perspective ouverte d’un de ces nouveaux grands boulevards. À ses pieds, les gravats s’amoncellent, couverts par endroit de planches pour faciliter le passage des ouvriers. Sur la droite, le vide laissé par un immeuble détruit laisse apparaître les conduits de cheminées. Dans la rue, de rapides coups de pinceau suggèrent la présence des piétons qui traversent la ville en chantier. Pour cette œuvre, Harpignies réduit sa palette à des tons bruns et gris tout juste relevés d’un vert éteint pour évoquer les arbres au loin. Par le jeu de la réserve qui laisse voir la blancheur du papier, l’artiste éclaire le sol et les façades de son sujet.

Paysagiste reconnu et ami de Corot, Henri Harpignies multiplie dans la seconde moitié du XIXe siècle ses vues de Paris à l’aquarelle. Elles témoignent jour après jour de l’évolution de la ville pendant et après les travaux d’Haussmann. Jusqu’aux derniers jours de sa vie, quand il n’est pas à Menton, l’artiste continue de peindre avec acharnement la capitale. Il meurt en 1916 à l’âge de quatre-vingt-dix-sept ans, fort d’une carrière parmi les plus longues de l’histoire de l’art.

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