Jean-Léon GÉRÔME (1824-1904)

Vendu

Étude d’homme de dos, vers 1872 
Première pensée pour Pollice verso
Crayon sur papier
15 x 14,5 cm 
Annoté sur le montage d’origine Jean Léon GERÔME

Vendu

Ancien élève de Paul Delaroche et de Charles Gleyre, Gérôme est depuis 1846 le héraut de l’esthétique néo-grecque. Nourries par de nombreuses lectures sur Pompéi et l’histoire de Rome, ses peintures illustrent une Antiquité savamment étudiée, résultat de recherches approfondies, menées davantage à la manière d’un archéologue que de celle d’un peintre d’histoire. Pour le rendu historique, il questionne Eugène Viollet-le-Duc et visite les collections du comte James-Alexandre de Pourtalès, riches en armes antiques, ainsi que le musée archéologique de Naples. L’émerveillement du peintre pour l’Antiquité se traduira par la suite dans les œuvres inspirées par son voyage dans le sud de l’Italie. Gérôme utilise une première fois les arènes comme décor en 1859 avec Ave Caesar, morituri te salutant, puis en 1872 avec Pollice verso. Le cirque, et plus précisément le Colisée, se retrouve encore une fois dépeint en 1883 dans La Dernière prière des martyrs chrétiens.

L’expression pollice verso (le pouce renversé), que le peintre utilise pour titrer son chef-d’œuvre, provient d’une mauvaise interprétation des traducteurs du poète Juvénal. Pour les historiens, le geste était celui d’un doigt tendu en direction du gladiateur à sacrifier. De manière à déterminer la composition générale, Jean-Léon Gérôme réalisa plusieurs études au crayon. L’une d’elles représente un gladiateur esquissant un dernier geste de désespoir dirigé vers la tribune où se situe l’organisateur des jeux, souvent l’empereur, qui devra statuer sur son sort après avoir consulté l’avis de la foule. Le soin apporté au traitement du bras montre l’intérêt de l’artiste pour ce détail qui doit concentrer tout le drame de la scène. Finalement, Gérôme supprimera cette figure agenouillée dans la composition définitive au profit d’un gladiateur vaincu, couché sur le dos, terrassé par un Thrace posant son pied sur sa gorge avant de savoir s’il devra éliminer son adversaire. Gérôme conserve néanmoins le geste dramatique de la main tendue avec trois doigts dressés. 

Malgré les railleries de Charles Baudelaire ou de Champfleury, Gérôme a su mettre en place dans ses compositions à grand spectacle une vision de l’Antiquité qui parvient à séduire le public du Second Empire. Quelques décennies plus tard, les cinéastes vont largement s’inspirer de ces œuvres en allant jusqu’à l’imitation des plans et cadrages inventés par le peintre. Des films tels que Quo vadis, Spartacus, ou plus récemment Gladiator semblent redonner vie aux figures inanimées de Gérôme. Si le geste de demande de clémence pollice verso n’a rien d’historique, Gérôme et le cinéma lui ont donné une réalité dans la conscience collective.