Portrait d’une courtisane, 1877
Huile sur toile
41,5 x 38 cm
Signé et daté en haut à droite F. Barrias 1877
Vendu
Sous le Second Empire puis la Troisième République, la prostitution permet à certaines femmes de gravir rapidement les échelons sociaux. Comme a pu le montrer l’exposition Splendeurs et misères. Images de la prostitution (1850-1910) présentée en 2015 au musée d’Orsay, la marquise de la Païva, Liane de Pougy, Valtesse de La Bigne, Henriette Hauser et plus tard Sarah Bernhardt obtiennent le statut ambivalent de courtisanes. Autrement appelées « grandes horizontales » ou « demi-mondaines », ces femmes fréquentent la meilleure société parisienne et peuvent se faire construire de luxueux hôtels particuliers. La Païva, par exemple, pour décorer sa demeure des Champs-Élysées, fait appel aux meilleurs artisans et à des peintres renommés que l’on qualifiera plus tard de « pompiers » par opposition aux impressionnistes.
En 1877, le peintre académique Félix-Joseph Barrias, ancien lauréat du Prix de Rome, réalise le portrait en buste d’une jeune femme. Sur une toile presque carrée, le modèle découvre une épaule et l’amorce d’un sein tout en nous fixant de ses yeux sombres et mélancoliques. Sa position alanguie et le collier de perles blanches noué dans sa belle chevelure rousse, laissent penser qu’il doit s’agir d’une courtisane.
Henri Gervex, en 1878, scandalisera le comité en voulant présenter au Salon une toile illustrant le poème d’Alfred de Musset, Rolla : la femme nue allongée sur le lit défait, le corset dénoué à terre — suggéré au peintre par Manet — les perles, le haut de forme et la canne ne laissaient en effet aucun doute sur la nature de la scène. La même année que notre tableau, Édouard Manet se voit lui aussi refuser au Salon son tableau Nana. Les modèles qui ont posé pour Gervex, Manet et Barrias partagent un grand nombre de points communs. Dans le cas de Manet, nous savons que l’actrice et courtisane Henriette Hauser, alors âgée de quarante-sept ans, posa pour la figure de Nana même si elle semble avoir été rajeunie par le peintre. Sa coiffure ainsi que sa physionomie générale nous laissent penser qu’elle a également pu prêter ses traits à la langoureuse femme rousse peinte par Barrias. Une autre toile du peintre, datant de 1879, reprend un modèle approchant mais aux traits plus stylisés dans une atmosphère orientaliste. Vendu aux enchères en 2010, ce dernier tableau fut proposé sous le titre Femme orientale, allégorie de la Richesse et de la Vérité.
Nous remercions Madame Margarida Güell-Baró d’avoir confirmé l’attribution à Barrias après un examen photographique.