Jean-Baptiste LECŒUR (1795-1838)

Vert-Vert au couvent, vers 1830
Huile sur panneau
28 x 23 cm
Signé en bas à droite Lecœur
Porte une étiquette sur le cadre d’origine Ververt au couvent / acheté le 22 Mars 1872 f. 23. / Vente Bazin
Numéroté au revers 93
Provenance présumée : Alfred Bazin (1821-1872) ; sa vente, Angers, Me Porché, 21 mars 1872

Jean-Baptiste Lecœur est un peintre français né au Mans en 1795 et mort à Paris en 1838. Certaines sources le disent élève de Jean-Baptiste Regnault. Après sa formation, il participe au Salon de 1822 à 1837 où son adresse est d’abord mentionnée à Passy, puis, à partir de 1835, rue du Bac, au numéro 106. Ses œuvres, souvent de petites dimensions, représentent des scènes de genre, inspirées souvent du XVIIe siècle hollandais ou de l’esprit troubadour alors en vogue (1). Plusieurs musées français conservent ses œuvres : le musée Tessé du Mans d’où il est originaire, mais aussi le musée d’Arts de Nantes ou encore le musée des Beaux-Arts de Dijon (2).

Sur un panneau de bois, Lecœur choisit de représenter un épisode de l’histoire du perroquet Vert-Vert tirée d’un ouvrage de Jean-Baptiste Gresset publié en 1734. Intitulé Vert-Vert ou Le voyage du perroquet vert de Nevers, ce « poème héroïque » raconte les aventures d’un perroquet recueilli par le couvent de la Visitation de Nevers. Élevé par les sœurs, Vert-Vert, « perroquet dévot », parle un langage très chrétien et récite « des cantiques, des Oremus, des colloques myſtique. Il diſoit bien ſon Benedicite, et notre Mere, & votre charité. Il ſçavoit même un peu du Soliloque Et des traits fins de Marie Alacoque » (3). Réclamé par les Visitandines nantaises, il apprend durant son voyage sur la Loire l’argot des matelots. Les religieuses de Nantes, épouvantées par son vocabulaire fleuri, le renvoient à Nevers où il finit ses jours entouré de sollicitude, au point de mourir d’indigestion. L’épisode que le peintre choisit de représenter ici est soit le moment au l’oiseau arrive à Nantes, soit celui de son retour à Nevers. Sur le pas de la porte du couvent, flanquée de colonnes et surmontée d’un arc, le volatile est maintenu dans une cage tenue par un mousse entouré de quatre nonnes qui semblent emplies de joie. Derrière ce groupe à l’avant-plan, on voit l’intérieur de l’édifice et un escalier inondé de soleil par lequel montent d’autres sœurs.

Au XVIIIe siècle, si le poème ne plaît pas du tout aux sœurs de la Visitation, qui obtiennent que Gresset soit sanctionné, le texte est très à la mode et doit être republié à plusieurs reprises. Au siècle suivant, les artistes troubadours, de la Restauration et de la monarchie de Juillet – François Marius Granet, Claudius Jacquand, Auguste Couder, Fleury-Richard et même le dramaturge Jacques Offenbach en 1869 – s’emparent du sujet, parfois pour son côté subversif et anticlérical, parfois simplement pour son côté cocasse.

(1) Voir : J.-B. Lecœur, Les Plaisirs de l’été, huile sur panneau, 32,5 x 40,5 cm, vente anonyme, Paris, Millon, 2 octobre 2018, n° 44 ; J.-B. Lecœur, Femme infidèle à l’as de cœur, 1837, Buveurs à la taverne, 1837, paire d’huiles sur toile, 35 x 27 cm (chaque), vente anonyme, Nogent-sur-Marne, Lucien Paris, 14 mai 2018, n° 170 ; J.-B. Lecœur, La Rencontre secrète, 1838, huile sur toile, 41 x 32,5 cm, vente anonyme, Vienne, Dorotheum, 7 février 2013, n° 92.
(2) J.-B. Lecœur, Mère et fils, 1831, huile sur toile, 35 x 38 cm, Nantes, musée d’Arts ; J.-B. Lecœur, Le Cours Saint-Pierre à Nantes, 1831, huile sur toile, 60 x 73 cm, Nantes, musée d’Arts ; J.-B. Lecœur, Intérieur avec personnages, huile sur toile, 36 x 43 cm, Le Mans, musée Tessé ; J.-B. Lecœur, Famille après l’incendie, huile sur toile, 62 x 50 cm, Dijon, musée des Beaux-Arts.
(3) Jean-Baptiste Gresset, Vert-Vert ou Le Voyage du perroquet de Nevers. Poëme héroïque, 5e éd., s.l., 1735, p. 12.

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