Alexandre-Gabriel DECAMPS (1803-1860)

Soldat turc jouant du bouzouki, vers 1833
Fusain et pastel sur papier
25 x 33 cm
Signé en bas à droite Decamps

Vendu

Théophile Gautier peut paraître excessif en qualifiant Decamps de découvreur de l’Orient ; il reflète pourtant assez bien l’opinion générale des critiques et du public sur le peintre en son temps. Bien qu’ayant passé quelques années dans les ateliers d’Étienne Bouhot puis d’Abel de Pujol, Decamps s’éloigne rapidement du parcours académique. Comme beaucoup de jeunes artistes, il débute en fournissant des illustrations et des caricatures aux journaux. Dès 1827, il participe au Salon et exécute ses premières œuvres orientalistes telles que Les Janissaires, ou Soldat de la garde du Vizir. Ce n’est pourtant que l’année suivante qu’il part pour la Grèce en compagnie du peintre Louis Garneray et découvre l’Orient. Il poursuit alors son périple jusqu’à Constantinople et Smyrne. Durant son séjour, il réalise un grand nombre de croquis qui vont nourrir par la suite l’ensemble de sa production. À son retour, il expose au Salon de 1831 sept peintures dont La Patrouille turque qui lui vaut sa première médaille. Trois ans plus tard, Un corps de garde sur la route de Smyrne à Magnésie rencontre un immense succès public. Les commentaires de l’époque mentionnent qu’il a ébauché ce sujet durant son voyage. Au centre de cette toile, l’artiste installe un garde coiffé d’un turban, un fusil à ses pieds, jouant du bouzouki, sorte de longue mandoline ottomane.

Decamps était également un excellent dessinateur et aquarelliste qui n’hésitait pas à exposer ses plus belles feuilles comme des œuvres à part entière. Sur une page de papier gris bleu, l’auteur reprend la figure centrale du joueur de bouzouki présente dans son tableau du Salon de 1834. Assis, adossé au mur d’une ruelle, l’homme nous regarde fixement en tenant son instrument. Deux enfants de pro l, une fillette et un petit garçon, se sont arrêtés pour l’écouter. À gauche, la perspective s’ouvre sur une rue étroite où deux silhouettes en costume oriental se sont figées dans l’ombre. Decamps, qui aime les détails et cisèle son dessin de motifs finement brodés sur les costumes, a intégré à gauche du musicien un minuscule lézard qui semble grimper sur le mur en direction d’une affiche. L’ensemble traité largement au fusain est relevé de craie rouge et blanche sur les vêtements des différents personnages qui se détachent du fond avec subtilité.

Les œuvres orientalistes de Decamps ont fortement marqué toute une génération d’artistes. Cette influence est particulièrement sensible dans Les Convulsionnaires de Tanger, toile peinte par Eugène Delacroix en 1837. Le château de Chantilly, qui conserve aujourd’hui encore la collection du duc d’Aumale toujours intacte, présente plusieurs des chefs- d’œuvre acquis auprès du peintre par ce ls de Louis Phi- lippe. Le Corps de garde sur la route de Smyrne à Magnésie dont découle ce dessin est l’une de ces œuvres.

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