Felice GIANI (1758-1823)
Les anges frappant de cécité les habitants de Sodome, vers 1800
Encre et lavis d’encre brune sur papier
32,5 x 41 cm
Signé dans la partie inférieure de la feuille Giani
Vendu
L’épisode biblique qu’illustre ce dessin est l’un des moments qui précède et provoque la destruction de la ville de Sodome dans Le Livre de la Genèse. Ayant décidé de punir la ville de Sodome, Dieu dépêche deux anges pour vérifier si les habitants méritent véritablement de subir le châtiment divin. Ces derniers sont accueillis par Loth, le neveu d’Abraham, qui leur offre le gîte et le couvert. Très rapidement le vieil homme est pris à partie par la population : « Où sont les hommes qui sont venus chez toi cette nuit ? Amène-les nous pour que nous les connaissions. » Loth propose ses deux filles vierges en échange mais les habitants refusent. Face à l’insistance et la colère de la foule amassée devant la maison de Loth, les anges sortent et frappent de cécité les hommes venus les chercher. En récompense de son accueil, Loth est sauvé avec sa famille avant que la ville et ses occupants soient frappés par une pluie de souffre et de feu. Les deux anges tracés à l’encre brune sont légèrement dé- centrés sur la gauche. Ils protègent Loth tout en menaçant la foule des hommes qui occupent la droite de la composition. L’ensemble des figures se détache tel un bas-relief de sarcophage antique. Le sol, mêlant nuages et poussière, répond en partie basse aux murs de la maison de Loth et au paysage qui domine le groupe. L’encre lavée autour des anges met en valeur la réserve de leurs vêtements qui s’éclairent par contraste et irradient la page. L’artiste choisit d’occuper l’intégralité de l’espace, sans offrir aux spectateurs un endroit où le regard puisse se reposer, créant à la fois un effet dynamique et un sentiment de saturation oppressant. Felice Giani est l’un des principaux représentants de l’école néo-classique italienne de la fin du XVIIIe siècle. Après s’être formé à Pavie puis à Bologne, Giani s’installe à Rome en 1780. Il y fréquente Giuseppe Cades et Angelica Kauffmann, avec qui il partage de nombreux points communs stylistiques et une même vision de l’art de leur temps. Ses œuvres, fortement influencées par l’antiquité la plus pompéienne, alternent sujets bibliques et mythologiques. Traitées dans une « manière » à la fois élégante et monumentale, elles assument également une dette à l’art de Michel-Ange et à sa Terribilità. L’ambiguë beauté des deux anges peut évoquer celle des ignudi qui ornent le plafond de la chapelle Sixtine et renvoie à l’unique péché reproché aux habitants de Sodome : leur prétendue homosexualité.