Jean-Baptiste FRÉNET (1814-1889)

La Pentecôte, vers 1835-40
Crayon et pastel sur papier
39,5 x 60,5 cm

Offert au musée des Beaux-arts de Lyon

Comme un certain nombre de jeunes artistes lyonnais avant lui, Jean-Baptiste Frénet rejoint l’atelier d’Ingres à Paris pour parfaire sa formation. En 1834, il y retrouve Michel Dumas, Claudius Lavergne et Louis Janmot. Ingres doit fermer son atelier peu de temps après pour prendre la direction de l’Académie de France à Rome. Frénet, Janmot et Lavergne préparent leur départ pour rejoindre leur maître en Italie, mais sans Dumas dont les finances ne permettent pas un tel voyage. Durant son premier séjour parisien, Frénet fréquente Frédéric Ozanam et intègre comme Janmot la Société de Saint-Vincent-de-Paul. Il se rapproche également de Henri Lacordaire, un jeune prêtre prometteur.

Surnommé le frénétique par ses amis tant pour son caractère que pour sa manière de travailler, Frénet expérimente et mélange différentes techniques sur la feuille et sur la toile. Pastel gras, encre et peinture s’associent au crayon et à des effets de grattage qui confèrent une modernité surprenante à ses œuvres. Sa production, presque intégralement religieuse hormis quelques portraits et paysages, intègre régulièrement des autoportraits en guise de cameo. La Vierge Marie, dressée au centre de la feuille, tend les bras et lève les yeux vers les langues de feu qui descendent du ciel. Comme le veut la tradition, elle est entourée le jour de la Pentecôte par l’ensemble des douze apôtres, ainsi que de Marie de Béthanie et de Marie-Madeleine. Lorsque l’on détaille le nombre de figures dans l’œuvre de Jean-Baptiste Frénet, on peut relever seize personnages, trois femmes et treize hommes. Si la plupart des figures masculines semblent s’inspirer des traits de l’auteur, leur nombre échappe aux canons habituels. Il y a donc un intrus. À droite de la Vierge, un jeune moine au visage glabre et à la tonsure légèrement marquée se tient assis face à nous et présente un livre ouvert. Frénet n’a pas fait d’autre erreur que celle d’intégrer l’un de ses contemporains à la physionomie facilement reconnaissable : Lacordaire.

Sur la proposition de Frédéric Ozanam, l’abbé Lacordaire débuta un cycle de conférences qui rencontra un vif succès auprès de la jeunesse en général et des artistes en particulier. Soupçonnées de pervertir le jeune public par des idées trop libertaires, elles furent rapidement suspendues. Grâce à l’intervention de l’archevêque de Paris, il put prêcher de nouveau à l’occasion du carême le 8 mars 1835 dans la cathédrale Notre-Dame de Paris puis poursuivre ses conférences. Ses prêches, qui mêlaient avec exaltation philosophie, politique, poésie et religion, lui attirèrent l’admiration de son public mais les foudres de ses pairs. Attaqué sur ses faiblesses théologiques, le talentueux abbé quitta Paris pour Rome où il entra chez les jésuites. L’affection que les artistes lui portaient se retrouve dans les magnifiques portraits qu’ont réalisés de lui, Théodore Chassériau en 1841 et Louis Janmot en 1846, deux autres élèves d’Ingres.

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