Joseph BLANC (1846-1904) et Georges BARDON (1846-1905)

Allégories des Arts, 1888
Quatre vitraux peints
ø 20 cm (chaque)
55 x 55 x 12 cm (montage)
Signé et daté sur chaque vitrail Georges Bardon 1888 – Paul Joseph Blanc

Né à Montmartre en 1846, Joseph Blanc, parfois prénommé Paul-Joseph ou Joseph-Paul, est un artiste polyvalent que l’on connaît principalement pour ses tableaux néo-maniéristes présentés au Salon – notamment son Persée – et les grands décors qu’il réalise pour l’Opéra-Comique ou l’Hôtel de Ville de Paris. Successivement élève d’Émile Bin et d’Alexandre Cabanel, il intègre l’École des Beaux-Arts de Paris en 1862. Deux années plus tard, il expose au Salon La Première faute mais doit attendre 1867 pour obtenir le Prix de Rome de peinture sur le sujet Le Meurtre de Laïus par Œdipe qui lui permet de se rendre en Italie. De retour à Paris en 1872, fort du succès rencontré par le Persée envoyé depuis Rome en 1870, Joseph Blanc reçoit de nombreuses commandes dont la plus prestigieuse reste son cycle de peintures pour le Panthéon.

En 1887, il réalise des cartons préparatoires à quatre petits vitraux circulaires dont il confie la réalisation au maître-verrier Georges Bardon. Ce dernier, né la même année que Blanc, en 1846, meurt une année après lui en 1905. Il a notamment peint en 1885 plusieurs vitraux de la cathédrale Saint-Louis de Blois d’après les cartons d’Edmond Lechevallier-Chevignard (1). Ayant repris l’atelier Lusson, une des grandes manufactures de vitraux du XIXe siècle (2), il propose des « vitraux civils » et des « vitraux et vitreries d’appartements » (3). Si les circonstances exactes de la rencontre entre les deux artistes restent conjecturales, tous les deux connaissaient Luc-Olivier Merson : Bardon réalise en effet des vitraux d’après ses dessins dès 1880 (4) et Merson connaissait Joseph Blanc de l’École. Ils sont en outre tous les trois nés la même année. Les attributs choisis par Blanc permettent d’identifier aisément quatre Allégories des Arts. Sur le premier médaillon en haut à gauche, représentant la Musique, le premier putto, qui joue du violon, semble assis sur un luth et un cor se trouve à sa gauche. Dans le médaillon en haut à droite, le deuxième putto évoquant la Poésie joue de la lyre à trois cordes et regarde mélancoliquement dans le vide. Dans le tondo en bas à gauche, l’Art pictural est figuré par un enfant, non ailé, occupé à peindre un buste de femme de profil sur un petit chevalet. Il tient de la main gauche une palette et d’autres pinceaux. La dernière allégorie, en bas à droite, évoque la Sculpture et est, elle aussi, dépourvue d’ailes et affairée, un ciseau et un maillet dans les mains, à réaliser un buste antique de femme posé sur une petite sellette. Les quatre enfants, potelés et blonds, sont assis sur de l’herbe. Drapés d’or, ils sont en réalisés dans un camaïeu subtil de jaune-doré qui évoque l’art de la grisaille. Il y a quelques années, deux études pour ces vitraux sont passées sur le marché de l’art : il s’agit des Allégories de la Poésie et de la Sculpture signées et datées de 1887 (5).

L’année suivante, en 1889, Blanc occupera le poste de professeur à l’École des Beaux-Arts. Il s’essayera aussi dans le domaine des arts décoratifs et « industriels ». Devenu l’un des principaux peintres décorateurs de la IIIe République, c’est à lui qu’est confiée la réalisation des cartons pour l’immense céramique qui orne encore aujourd’hui la façade du Grand-Palais inauguré pour l’Exposition universelle de 1900. Il réalise plusieurs projets pour des grandes tapisseries qui seront tissées par la manufacture des Gobelins et qui sont conservées dans les collections nationales (6). Si son œuvre peint et dessiné est désormais bien connu grâce à la thèse de Pierre Sérié (7) qui l’a fait sortir de l’oubli auquel il avait été condamné pendant plus d’un siècle, l’étude des cartons de vitraux qu’il a pu réaliser au cours de sa vie reste encore à faire. En guise d’oraison funèbre, Merson écrira l’année de sa mort : « Il faut s’incliner avec respect devant l’œuvre de Blanc. Il était de la forte race des maîtres… » (8).

(1) Didier Rykner, « Églises reconfinées : la cathédrale de Blois », La Tribune de l’Art, 10 novembre 2020 (en ligne : https://www.latribunedelart.com/eglises-reconfinees-la-cathedrale-de-blois)
(2) Les informations sur Georges Bardon sont rares. Les quelques bribes de sa biographie connues ont été permises grâce à la thèse d’Amélie Duntze-Ouvry sur le peintre verrier Eugène Stanislas Oudinot de la Faverie : Amélie Duntze-Ouvry, Eugène Stanislas Oudinot de la Faverie artiste peintre-verrier (1827-1889) et le renouveau du vitrail civil au XIXe siècle, Clermont-Ferrand, 2016, pp. 253-263-313 et 326 (en ligne : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01693889/document).
(3) Ibidem, p. 253. Voir aussi : Jean-François Luneau, « Vitrail archéologique, vitrail-tableau. Chronique bibliographique », Revue de l’Art, 1999, n°124, p. 72.
(4) Le Sacré Cœur apparaissant à Marie-Alacoque pour l’église de Mussy-sur-Seine dans l’Aube, aujourd’hui détruit.
(5) Joseph Blanc, Allégories, 1887, encre, plume et aquarelle sur papier, ø 20 cm, vente anonyme, Paris, L’Huillier & Associés, 27 novembre 2017, n° 147.
(6) Notamment dans les collections du Mobilier national à Paris ou au musée d’Arts de Nantes.
(7) Pierre Sérié, Joseph Blanc (1846-1904), peintre d’histoire et décorateur, mémoire de l’École du Louvre, Paris, 2008.
(8) Cité par Ibidem.

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