François Marius GRANET (1775-1849)

Deux moines dans une cellule, 1846
Aquarelle et encre sur papier
31,2 x 24 cm
Signé et daté au centre Granet 1846

Vendu

La révolution de Juillet 1830 mène à la chute des Bourbons et à l’accession au trône de Louis-Philippe comme roi des Français. Dans un but de pacification historique, le nouveau souverain souhaite créer au château de Versailles un musée d’histoire dédié « à toutes les gloires de la France » et fait appel à François Marius Granet en 1833 pour diriger ce projet. Le peintre, qui après un séjour de plus de vingt années passées en Italie occupait un poste de conservateur au musée du Louvre, s’investit pleinement dans cette nouvelle mission pendant les quinze années qui vont suivre. Il dirige l’agencement des salles, sélectionne les œuvres déjà existantes et leur restauration tout en passant commande de nouvelles toiles aux meilleurs artistes de son temps. Après l’inauguration de la galerie des Batailles en 1837, il s’attelle à l’organisation des salles consacrées aux croisades et réalise lui-même plusieurs compositions à cet effet.   

En marge de sa production officielle destinée au Salon ou aux commandes de Versailles, Granet se consacre à la réalisation d’aquarelles plus personnelles. Arpentant le domaine du château dont il a la gestion, il trace avec un pinceau d’une grande liberté les paysages et les jardins à chaque saison. Durant cette période, il peint également un petit nombre d’aquarelles aux sujets plus traditionnels mais dans des formats pour lui inhabituels. C’est le cas d’une grande feuille datée de 1846. Composée verticalement, elle montre deux moines dans une cellule. Le premier, vêtu de blanc, est assis sur le sol, adossé à un bloc ou une caisse. Plongé dans la prière, il tient entre ses mains un livre grand ouvert. Le second, habillé d’un costume blanc et brun, vient d’entrer par une porte en bois et tient une cruche à la main. Le décor, bien que relativement dépouillé, est mis en scène par l’artiste de manière complexe. Si la plupart des détails, sol, porte, grille ou drapé, sont traités avec finesse, certains éléments comme la fenêtre sur la gauche de la composition font preuve d’une liberté purement graphique. Les traces d’encre noire qui s’échappent de l’ouverture ont quelque chose de menaçant qui évoque les plus belles feuilles de Victor Hugo et donnent à la scène un côté gothique. Probablement fier de cette page, Granet a choisi de la signer et de la dater ostensiblement à l’encre sur la porte, au centre de la composition. Cette œuvre peut être rapprochée de la série des scènes de prison, thème cher à Granet depuis sa jeunesse et hérité de son premier maître Constantin d’Aix. L’absence de grilles à la fenêtre suggère cependant que le moine reclus ici a choisi son isolement. 

À l’aube de la révolution de 1848, Granet quitte son poste à Versailles et rentre dans sa Provence natale où il décède l’année suivante. Par testament, il lègue l’intégralité de son atelier et de ses collections à la ville d’Aix-en-Provence. Cet ensemble de plusieurs centaines d’œuvres constitue le fonds du musée qui porte aujourd’hui son nom. 

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