Pierre Eugène GRANDSIRE (1825-1905)

Le Quai d’Anjou près du pont Marie, vers 1870
Huile sur panneau
20,8 × 15,3 cm
Signé en bas à gauche e. grandsire

Né à Orléans en 1825, Eugène Grandsire apprend son métier d’artiste auprès de Jules Dupré, paysagiste, et de Jules Noël, peintre de marines. À vingt-trois ans, il part visiter l’Europe, traversant l’Autriche, la Bohême et l’Italie où il séjourne quelque temps à Venise. Dans la Sérénissime, Grandsire dessine au crayon et à l’aquarelle des vues du port, de la place Saint-Marc et du marché de l’Erbaria, au Rialto. De retour en 1850, il publie un album de quinze lithographies représentant les différentes résidences de la famille royale des Bourbons depuis leur exil. La même année, son nom apparaît au livret du Salon pour la première fois avec un dessin de paysage animé d’un chasseur. Entre 1852 et 1859, le peintre expose différentes vues d’Italie et d’Autriche inspirées de ses carnets de voyage et collabore, en marge de ses participations aux salons, comme illustrateur avec de nombreux journaux tels que L’Illustration et Le Magasin pittoresque.

Durant les deux décennies suivantes, Grandsire visite la France en quête de motifs, et passe par les Vosges et le Finistère d’où il rapporte de nouveaux sujets pour ses peintures. À Paris, il vit d’abord rue des Beaux-Arts avant de s’installer durablement au 25, quai Voltaire face au Louvre. De ses fenêtres, il peut voir la Seine et la succession des ponts qui la traversent. Un jour de plein soleil, alors qu’il longe le fleuve sur l’île Saint-Louis, le peintre interrompt sa marche quai d’Anjou pour monter dans une barque amarrée et se met au travail. D’un trait de crayon sur une planchette de bois, il cadre son paysage avec l’acuité d’un photographe. Devant lui, un marinier attend sur son bachot la fin du chargement en regardant passer à quai, sous le pont Marie, femmes et enfants qui profitent du beau temps pour se promener. Plus loin sur la Seine, le peintre esquisse le pont Louis-Philippe construit quelques années plus tôt. Avec une palette limitée, Grandsire place ses couleurs en aplat et révèle certains détails par de petites touches serrées pour restituer la lumière d’un jour sans nuages sous le ciel de Paris. 

Dans ses Promenades autour d’un village, publié pour la première fois en 1860, George Sand évoque les œuvres d’Eugène Grandsire : « En regardant ces croquis de M. Grandsire, nous retrouvions toutes les douces émotions de nos rêveries à travers ces promenades enchantées, et, quant à moi, il m’eût été bien impossible de dire comment ce petit bout de papier crayonné si promptement contenait tant de choses auxquelles j’avais songé, et qui m’apparaissaient de nouveau avec la traduction des objets dont j’avais savouré la couleur et la forme. »