Eugène Modeste Edmond POIDEVIN, dit Eugène LE POITTEVIN (1806-1870)

Mer agitée sur les côtes normandes, vers 1855-1860
Huile sur toile
38,2 × 46,4 cm
Provenance : collection particulière, Belgique
Publication et exposition : L’Invention d’Étretat. Eugène Le Poittevin, un peintre et ses amis à l’aube de l’impressionnisme, Fécamp, Les Pêcheries-Musée de Fécamp ; Rouen, Éditions des Falaises, 2020, no 54, p. 138 : « Eugène Le Poittevin attribué à, Mer agitée avec une mouette, non daté, huile sur toile, 385 × 465 mm ; inscriptions illisibles au verso, peut-être e lp… in/No 41 »

Eugène Modeste Edmond Poidevin naît à Paris en 1806. Son père ébéniste ayant trouvé un poste au château de Versailles, toute la famille s’installe près de la demeure royale alors qu’Eugène est encore enfant. Attiré par les arts, le jeune garçon reçoit ses premières leçons d’un petit maître local avant de rejoindre à Paris l’atelier d’Anne Xavier Leprince qui lui donne le goût pour le paysage. À la mort de son maître en 1826, Eugène s’installe dans l’atelier de celui-ci et s’inscrit à l’École des beaux-arts où il a Louis Hersent comme professeur. Malgré deux échecs au concours du prix de Rome, il expose ses toiles au Salon à partir de 1827, sous le nom de Potdevin (« Pot-de-vin » au registre), et travaille comme lithographe pour les journaux. Ayant déjà obtenu une certaine reconnaissance, celui qui prend finalement le nom de Le Poittevin en 1831 voyage en France, en Italie, en Hollande et dans les Flandres. Durant la monarchie de Juillet, il reçoit plusieurs commandes pour la galerie des Batailles de Versailles, puis est nommé peintre officiel de la Marine en 1849. Sur les conseils de son ami Eugène Isabey, il se rend souvent en Normandie et se fait construire en 1851 une villa à Étretat, baptisée La Chaufferette, ainsi qu’un atelier face à la mer. 

Fortement influencées par la peinture hollandaise et les toiles d’Eugène Isabey, les œuvres de Le Poittevin traitent dès lors principalement de sujets liés à la mer. Ces représentations de marins et de ramasseuses de goémon alternent avec des paysages purs où le peintre semble seul face aux éléments. Une de ses marines, probablement peinte au cours des années 1850 à Étretat, montre au premier plan deux poutres de bois émergeant de l’onde agitée. Les vagues qui frappent la falaise sont teintées d’ocre, chargées du sable remonté des fonds par l’agitation des flots. Au loin, une mouette déploie ses ailes pour échapper aux nuages noirs annonçant l’orage. La touche de l’artiste, épaisse pour traiter les rochers, se fait plus fluide pour traduire le mouvement de l’eau. 

À l’Exposition universelle de 1867, Eugène Le Poittevin présente son tableau Bains de mer, plage d’Étretat qui est acquis par Napoléon III pour le palais de l’Élysée. Deux ans après cette consécration, il invite Gustave Courbet à Étretat et lui prête son atelier. Durant son séjour, le chantre du réalisme peint sa célèbre Falaise d’aval après la pluie ainsi que les différentes œuvres composant sa série intitulée La Vague. Régulièrement, Le Poittevin s’amuse à dérouter le public en exposant des toiles dont les sujets tiennent de la caricature et qui lui valent des commentaires parfois acerbes de la part des critiques. En 2020, le musée des Pêcheries de Fécamp a consacré au peintre une exposition rétrospective accompagnée d’un catalogue dans lequel cette toile est reproduite.