Gustave DORÉ (1832-1883)

Érection de la croix, vers 1865
Matrice en bois de buis gravé par Adolphe Gusman (1821-1905) 
21,6 x 30,8 cm 
Signé en incise à gauche AGusmand Fc et à droite G. Doré 
Publication : Le Monde illustré, 19e année, n° 944, 15 mai 1875, p. 308

Vendu

En 1866, Alfred Mame publie deux luxueux volumes in-folio de La Sainte Bible selon la Vulgate illustrés par Gustave Doré. La réputation de l’artiste le précède depuis la publication, en 1861, de sa Divine Comédie et sa nomination au rang de chevalier de la Légion d’honneur. Pour cette nouvelle traduction de la Bible, Doré travaille durant quatre années et réalise plus de trois-cents dessins illustrant l’Ancien et le Nouveau Testament. Sur les 294 bois gravés, 228planches seront finalement publiées. 

Pour traduire en gravure ses compositions dessinées, Doré fait appel à une équipe d’artistes réputés, notamment à Adolphe Gusman, né Gusmand, un des rares graveurs sur bois médaillé au Salon. En collaboration avec son équipe, Doré réinvente le métier d’illustrateur. Il contourne les problématiques liées à l’interprétation en remplaçant la mine de plomb et la pointe d’argent par de la gouache et de l’encre posée en lavis. Ainsi, il peut peindre librement ses sujets directement sur le bois et laisser au graveur la charge d’évider le motif sans se borner à suivre les contours du dessin au trait. Pour l’épisode de l’Érection de la croix, Gusman grave sur bois deux des compositions pensées par l’illustrateur pour l’édition de Mame. Une première, verticale et lumineuse, sera publiée en 1866 tandis que l’autre, horizontale et sombre, ne sera pas retenue. La matrice en bois de cette seconde version témoigne des grandes qualités du style et de la virtuosité de Gusman pour les contrastes et les clairs-obscurs. Restée inédite pendant dix ans, cette planche est finalement publiée le 15 mai 1875 dans Le Monde illustré. Ce numéro du journal est consacré aux dessins inédits de Gustave Doré dans le contexte d’une vente d’œuvres de l’artiste organisée la semaine suivante à l’Hôtel Drouot. Publiée en pleine page, au même format que les grandes illustrations de l’édition Mame de Tours, cette œuvre, à la noirceur assumée, contraste avec le reste des illustrations de l’ouvrage de 1866.

Alors que la Biblede Mame est encore sous presse, l’art de Gustave Doré prend un nouveau tournant en intégrant définitivement l’iconographie religieuse à son répertoire. Surnommé à titre posthume « the preacher painter » (le peintre prédicateur) par nombre de ses contemporains anglais et français, Doré s’impose comme l’un des grands peintres religieux de son époque en réalisant entre 1865 et 1883, pour le Salon et la Doré Gallery de Londres, plus d’une vingtaine de toiles aux sujets bibliques, dont certaines aux dimensions monumentales.

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