Jules OURY, dit MARCEL-LENOIR (1872-1931)

Mise au tombeau, vers 1920
Huile sur papier marouflé sur toile
35,5 × 55,5 cm
Signé en haut à gauche et en bas à gauche Marcel-Lenoir
Jules Oury développe très tôt ses talents artistiques en assistant son père orfèvre à Montauban. En 1889, il part rejoindre son frère aîné, Louis, à Paris et fréquente l’École nationale supérieure des arts décoratifs. Décidé à devenir peintre, il prend le pseudonyme de Marcel-Lenoir, fréquente les artistes et les poètes du Quartier latin en arborant une longue barbe et un costume noir qui lui donnent l’air d’un vagabond effrayant. Menant une vie de bohème, Marcel-Lenoir peine à vendre ses travaux symbolistes jusqu’à sa rencontre avec l’éditeur Aimé Arnould (1867-1845) qui lui offre de diffuser ses créations passées et à venir. Durant les dernières années du siècle, l’artiste connaît ses premiers succès, mais rapidement le tumulte parisien et les nécessaires sociabilités pèsent sur son équilibre. Épuisé il quitte la capitale, pour regagner son Sud-Ouest natal. Sensible aux évolutions artistiques de son époque, son style, s’éloigne alors d’un certain mysticisme teinté de symbolisme et montre l’influence de Cézanne puis celle des jeunes artistes du groupe fauve. Depuis Montauban où il peint majoritairement des paysages, l’artiste se rend quelque temps en Espagne avant de revenir s’installer à Paris. Devant les commentaires contrastés que suscite la nouvelle orientation de son art, Marcel-Lenoir préfère abandonner durablement la vie publique pour se réfugier à Montricoux près de Montauban.
Au fin fond du Tarn-et-Garonne, l’artiste s’initie à l’art de la fresque et peint principalement des paysages, des natures mortes et des portraits avec une approche « cubisante ». En 1917, malheureux en ménage, Marcel-Lenoir quitte sa compagne Zoé Chappe, qui partageait sa vie depuis plus de quinze ans. Celle-ci, rendue folle de chagrin, tente de l’assassiner. Blessé par balle, il n’échappe que de peu à la mort. Parti en convalescence dans l’Ain, à Hauteville, il y tombe amoureux de son infirmière, Madeleine, qu’il épouse en 1919. L’ensemble de ces événements peut expliquer le retour du peintre au mysticisme de ses premières années. Adaptant le style Art déco à son profit, le peintre multiplie dès lors les toiles aux sujets d’inspiration chrétienne. Une Mise au tombeau, peinte à l’huile sur papier vers 1920, apparaît comme un exemple caractéristique de cette dernière « manière ». Le Christ, exagérément grand, occupe le centre de la composition, entouré de la Vierge et de sept autres figures. Le décor, peint par petites zones en aplat, contraste avec le traitement du volume des corps, travaillé par facettes dans un style encore cézannien. L’œuvre, véritable jalon de transition entre deux périodes, sera suivie d’une série de toiles peintes sur le même sujet, à l’image de sa grande Mise au tombeau de 1925, accrochée dans la cathédrale de Montauban.
Durant les dix dernières années de sa vie, l’artiste produit plusieurs milliers d’œuvres dans son château-atelier de Montricoux, avant de s’éteindre le 5 septembre 1931. Longtemps oublié ou rangé dans la catégorie des petits maîtres, Marcel-Lenoir connaît depuis peu de temps une timide remise en lumière. Le musée Ingres de Montauban, sa ville natale, lui avait consacré une exposition en 1994 dont le catalogue fait encore aujourd’hui référence.
