Jean-Baptiste LAVASTRE (1834-1891)

Vue depuis les toits de Montmartre, 1864
Encre et mine graphite sur papier
16,1 × 25,7 cm
Signé du monogramme, localisé et daté en bas à gauche JBL/MONTMARTRE/1864
Provenance : fonds d’atelier de l’artiste
Jean-Baptiste Lavastre naît au sein d’une famille d’humbles artisans à Nîmes en 1834. À quatorze ans il est placé par son père en apprentissage chez un peintre en bâtiment du nom de Rey. Attiré par une approche moins modeste de la peinture, l’adolescent assiste le soir au cours du peintre Numa Boucoiran, directeur de l’école de dessin municipale. Il profite également de ses rares moments de loisir pour arpenter le pays nîmois un carnet à la main. Assuré du talent de son élève, son professeur le présente à Léon Feuchère. Ce peintre, ancien décorateur de l’opéra de Paris installé à Nîmes depuis 1849, incite le jeune homme à gagner la capitale et le recommande auprès de son ancien associé Édouard Desplechin. Arrivé à Paris en 1854, Lavastre rejoint l’atelier de son nouveau maître à l’Opéra mais, sans ressources, doit accepter en parallèle de nombreux petits travaux pour survivre. Dix années durant, il assiste Desplechin, contribuant à la réalisation de décors prestigieux, pour le Faust de Charles Gounod en 1859 ou pour la première du Tannhäuser de Richard Wagner à Paris en 1861 sur la scène de l’opéra Le Peletier.
Lorsque Jean-Baptiste Lavastre quitte enfin son statut d’assistant pour s’associer avec son maître en 1864, il semble que l’artiste vit déjà à Montmartre. Si les livrets du Salon ne mentionnent son adresse, au numéro 2 de la rue des Trois-Frères, qu’à partir de 1871, un dessin de sa main localisé et daté « Montmartre 1864 » soutient cette hypothèse. Celui-ci, tracé à la plume sur une feuille de papier blanc est une vue prise depuis l’étage élevé d’un immeuble. Par la fenêtre devant laquelle l’artiste s’est posté se découvrent en contrebas deux maisons plus anciennes à deux et trois niveaux. Plus loin, clos par un mur, un jardin et une serre entourent un escalier étroit permettant d’accéder à un bâtiment laissé inachevé par l’artiste. Au sol, la rue pavée amorce une pente raide typique de la butte. Depuis la Révolution et jusqu’à la fin du siècle suivant, le quartier connaît des bouleversements majeurs. L’abbaye royale, détruite en 1793, avait laissé place à des terrains vagues qui, à partir de 1840, sont peu à peu lotis. Avec l’annexion du village par Paris en 1860, Montmartre intègre le nouveau XVIIIe arrondissement de la capitale et se modernise à un rythme effréné. L’évolution rapide du quartier rend difficile la localisation précise de certains lieux détruits depuis et non documentés à l’époque.
La suite de la carrière de Lavastre lui vaut reconnaissance et honneurs. Ses décors pour la scène du nouvel Opéra inauguré en 1875 participent à la notoriété de la salle construite par Charles Garnier. En parallèle de son activité principale, l’artiste expose au Salon des peintures inspirées par sa ville natale. Mort en 1891, dans sa maison de campagne, près de Rueil-Malmaison, à l’âge de cinquante-sept ans, il est inhumé au cimetière de Montmartre après des obsèques dans l’église Saint-Pierre, dernier vestige de l’ancienne abbaye, au sommet de la butte.