Jean-Charles-Joseph RÉMOND (1795-1875)

Des religieux de l’ordre de Saint-Dominique trouvent une femme précipitée dans les ruines du Colisée, à Rome, vers 1837
Huile sur toile
53,5 × 74,5 cm
Signé en bas à droite Remond
Expositions : Paris, Salon de 1837, no 1533 : Vue prise dans le Colisée à Rome ; Arras, salon de 1838, no 569 : Des religieux de l’ordre de Saint-Dominique trouvent une femme précipitée dans les ruines du Colysée [sic ], à Rome

Charles Rémond, fils d’un imprimeur parisien, se forme auprès de Jean-Baptiste Regnault à partir de 1809 avant d’entrer à l’École des beaux-arts de Paris en 1814 dans l’atelier du paysagiste Jean-Victor Bertin. Lauréat du prix de paysage historique en 1821, il part pour Rome et visite l’Italie pendant quatre années durant lesquelles il devient un adepte de la peinture de plein air aux côtés de Corot, Caruelle d’Aligny et Léon Fleury. À son retour à Paris, il ouvre un atelier et fait publier un recueil de vues d’Italie qui connaît un certain succès populaire. Parallèlement, il se consacre à ses œuvres pour les salons à venir. Fidèle à sa formation reçue chez Bertin, il expose principalement des paysages historiques fréquemment achetés par l’État. 

Au Salon de 1837, il n’expose pas moins de neuf peintures dont huit sont inspirées par son voyage en Suisse. Sa neuvième œuvre : Vue prise dans le Colisée à Rome évoque le souvenir de son séjour en Italie plus de dix ans plus tôt, mais ne peut être précisément considérée comme un paysage. De bon format, cette huile met en scène deux religieux dominicains au centre de ruines envahies par la végétation. La voûte qui les domine, depuis longtemps effondrée, laisse voir le ciel qui éclaire sur le sol le corps sans vie d’une femme en costume italien. Le Colisée recevait de nombreux moines venus en pèlerinage à l’endroit où les premiers chrétiens avaient subi le martyre. Il servait également de lieu de prière, une chapelle ayant été construite en son sein. L’un des deux frères prêcheurs se baisse pour toucher le cou de la jeune femme et semble vouloir vérifier la présence ou l’absence d’un pouls. Le second regarde avec pitié la morte gisant sur le sol et doit chercher à comprendre les circonstances de son décès. Aucun indice dans l’œuvre ne nous éclaire. S’agit-il d’un accident et, dans ce cas, qu’elle raison aurait-elle pu avoir de grimper sur les ruines ? D’un suicide ? Le lieu pourrait paraître mal choisi, la hauteur étant bien faible. Ou alors un assassinat par vengeance ou par jalousie. Le peintre nous invite à mener l’enquête aux cotés des religieux, tels Guillaume de Baskerville et son novice dans le roman d’Umberto Eco. L’année suivante, Rémond décide de participer à l’un des principaux salons de province, celui d’Arras, et expose une nouvelle fois sa toile en précisant son titre, mais sans nous offrir la solution du mystère. 

Depuis la fin du xviiie siècle, les romans sombres mettant en scène des moines se multiplient jusqu’à devenir un genre en soi. Le peintre aurait-il puisé son inspiration dans l’un d’eux, ou l’œuvre rend-elle compte de quelque fait divers gardé en mémoire depuis son voyage romain ?

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