Vue de Gaète depuis Formia, vers 1850-1852
Aquarelle sur papier
14 x 24 cm
Signé en bas à gauche hj harpignies
Provenance : Vente Tableaux modernes, aquarelles, dessins, gravures […], Paris, hôtel Drouot, jeudi 19 juin 1913, n° 35 : Gaëte (mer bleue)
Vendu
Henri Harpignies naît le 28 juillet 1819 à Valenciennes dans une famille de la grande bourgeoisie belge originaire de Mons. S’il aime très tôt dessiner, il ne découvre que tardivement sa vocation artistique après une première carrière dans les entreprises de son père. C’est finalement un voyage de neuf mois, pendant lequel il traverse la France jusque dans les Pyrénées, qui le décide à intégrer l’atelier parisien du peintre Jean-Alexis Achard, à l’âge de 27 ans. Avec son maître, il découvre le Dauphiné et les Flandres tout en s’exerçant à la gravure sur cuivre. Voulant s’éloigner des évènements parisiens de 1848, il entreprend plusieurs voyages en Allemagne, aux Pays-Bas puis découvre l’Italie en 1850. À Rome, il fréquente la Villa Médicis et ses pensionnaires puis quitte la capitale en direction du sud.
En suivant la via Appia, Harpignies atteint l’entrée de la ville de Formia où il trouve le mausolée de Cicéron. S’avançant vers la côte, il peut apercevoir le dessin de la ville de Gaeta se découpant entre ciel et eau. Selon Virgile, l’endroit tiendrait son nom de Caieta, la nourrice d’Énée qui aurait été enterrée là. La ville se présente comme une montagne fendue en deux, sorte de frontière entre le Latium et la Campanie. Située entre Rome et Naples, cette cité cernée par la mer Tyrrhénienne est un centre balnéaire prisé depuis l’Antiquité. Son riche patrimoine architectural, principalement médiéval, ponctue la découpe naturelle. Depuis le lointain son imposant château du XIIIe siècle et sa cathédrale dominent la mer. Réduisant sa palette à l’unique couleur bleue, plus ou moins diluée, l’artiste fait preuve d’un synthétisme étonnant en utilisant le blanc de la réserve. La feuille, prise horizontalement, se divise en deux parties presque égales séparées par la crête rocheuse. L’œuvre évoque avec des décennies d’avance les travaux de Ferdinand Hodler ou d’Henri Matisse.
De retour en France, Harpignies expose au Salon de 1853 une toile intitulée Vue prise dans l’île de Capri, golfe de Naples réalisée d’après certains de ses dessins tracés in situ. En fréquentant la forêt de Barbizon, il rencontre Corot. Les deux artistes se lient d’une profonde amitié et c’est ensemble qu’ils retournent Italie en 1860. De nouveau à Paris dès l’année suivante, le peintre connaît son premier grand succès au Salon avec Lisière de bois sur les bords de l’Allier, puis repart une nouvelle fois vers la péninsule pour un dernier voyage de trois ans. Cet ultime séjour italien inspire à Harpignies un grand nombre de peintures qu’il expose au Salon les années suivantes. À partir de 1870, les titres de ses œuvres d’inspiration italienne, qu’elles soient peintes ou dessinées, seront précédés du mot Souvenir.