Claude-Aimé CHENAVARD (1794-1838)

Métier à tisser de la manufacture Chenavard, vers 1827-1832
Encre noire et lavis brun sur papier
16,5 x 30,4 cm 
Publication : frontispice reproduit en gravure dans Recueil des dessins de tapis, tapisseries et autres objets d’ameublement exécutés dans la manufacture de M. M. Chenavard à Paris, Paris, Émile Lecomte, vers 1833

Né à Lyon en 1794, Claude-Aimé Chenavard grandit au sein de la manufacture de son père qui, à l’origine spécialisée dans le tissage de la soie et la fabrication de papiers peints, s’ouvre à la production d’objets d’arts décoratifs de très grande qualité. Adolescent, il entre en apprentissage dans l’atelier d’un architecte du nom de Dromard avant de s’inscrire à l’École des Beaux-Arts de Paris. Féru d’histoire, le jeune étudiant fréquente les bibliothèques et complète sa formation académique en autodidacte avant d’intégrer l’entreprise familiale. En 1829, Chenavard est appelé par le comte Turpin de Crissé, inspecteur des Beaux-Arts de la maison du Roi, à « redresser » la manufacture de tapisseries de Beauvais. À cette époque, l’artiste commence à publier ses recherches et ses réalisations sous forme de recueils gravés. Le premier, L’Album de l’ornemaniste en 1827, sera rapidement suivi d’autres ouvrages. 

Le Recueil des dessins de tapis, tapisseries et autres objets d’ameublement exécutés dans la manufacture de M. M. Chenavard à Paris, publié par Émile Lecomte, s’ouvre sur un frontispice gravé représentant un luxueux métier à tisser au centre duquel est repris le titre du recueil. Dessiné à la plume et au lavis d’encre brune sans lettrage, la feuille qui prépare à la gravure donne à la machine ouverte en son centre des airs de théâtre de marionnettes. Les décors de style pompéien entourent des cartouches aux formes géométriques dans lesquels l’artiste a inséré des vues intérieures et extérieures de sa manufacture. De part et d’autre, les rouleaux de tissu et les tapisseries se mêlent à la machinerie complexe du métier. 

La manufacture familiale vendue à la fin des années 1820, Chenavard s’impose peu à peu comme un rénovateur des arts décoratifs en France. Selon lui, la valeur d’une œuvre décorative tient à l’excellence de sa forme plus qu’à la richesse de sa matière. En tant qu’ornemaniste et décorateur, il fournit des dessins à la manufacture de Sèvres, dirigée par Alexandre Brongniart. L’artiste présente au Salon de 1831 un projet dessiné pour un vase monumental de style Renaissance et attire l’attention du public et de la critique sur lui. L’année suivante, le vase une fois sorti des fours de Sèvres est exposé à son tour. L’immense succès rencontré par celui-ci marque un tournant dans la production de la célèbre manufacture qui depuis plus de trente ans n’usait que du style néoclassique pour ses pièces d’exception. En 1833, le talent de Chenavard est déjà largement reconnu. Le journal L’Artiste le décrit tout à la fois comme « architecte, peintre, historien, ornemaniste, décorateur, poète, dessinateur ». On pourrait ajouter à cela la qualité d’ingénieur tant il maîtrise, au-delà de la forme purement esthétique, toutes les questions techniques de production, souvent ignorées par les autres artistes de son époque.