Portrait du frère de l’artiste, 1866
Huile sur toile
61 x 50 cm
Signé et daté en bas à gauche Henri Regnault / 1866 .
Vendu
Second d’une fratrie de quatre enfants, Henri Regnault est le fils du physicien Victor Regnault. À l’âge de neuf ans, il accompagne régulièrement son père qui vient d’être nommé directeur de la manufacture de Sèvres, puis débute de brillantes études au Collège de France. Le jeune homme évolue dans un entourage profondément marqué par l’art et la culture : sa mère est une cousine du peintre Amaury-Duval et son père est l’ami du paysagiste Constant Troyon. En 1856, le jeune Henri est victime d’un grave accident qui l’immobilise plusieurs mois. Pour s’occuper, il dessine et s’essaie à la sculpture. Ce passe-temps devient rapidement une passion dévorante. Remis de ses blessures, il termine ses études de lettres au lycée Napoléon d’où il sort bachelier en 1859. L’année suivante, Henri entre à l’École des Beaux-Arts dans l’atelier de Louis Lamothe, lui-même formé par Ingres et Hippolyte Flandrin. Son parcours est un enchaînement de succès jusqu’à l’obtention du Grand Prix de Rome de peinture en 1866.
L’année où il remporte cette distinction, Regnault peint le portrait d’un jeune homme de profil. Le modèle est le même que celui d’un portrait qu’il a dessiné sept ans plus tôt. Selon la tradition familiale, l’enfant sur ce dessin serait le jeune frère de l’artiste. Outre une ressemblance évidente, les deux figures adoptent exactement la même pose de profil. S’il existe de rares informations sur Léon, le frère aîné d’Henri, les recherches n’ont pas permis d’en apprendre davantage sur les deux plus jeunes enfants de la fratrie. Tel qu’on peut le voir sur la peinture, l’enfant paraît avoir quinze ans au plus, ce qui ferait remonter la naissance du modèle au début des années 1850. Le jeune homme vêtu d’une veste et d’un nœud papillon noirs semble fier, voire sévère. Bien que d’usage commun à cette époque, ce costume sombre porté par un enfant pourrait témoigner du deuil des frères Regnault qui viennent de perdre leur mère.
Fort de l’obtention du Grand Prix, Henri Regnault entreprend de voyager à travers l’Europe pendant quatre années. Il séjourne d’abord brièvement en Italie, puis en Espagne où il est témoin des bouleversements politiques liés aux guerres carlistes. Plus tard, accompagné de son ami le peintre Georges Clairin, il quitte la péninsule Ibérique pour le Maroc où il débute son tableau le plus célèbre, Exécution sans jugement sous les rois maures de Grenade actuellement conservé au musée d’Orsay. À l’annonce de la guerre de 1870, il rentre précipitamment en France et s’engage dans l’armée. Sa mort glorieuse et prématurée – il n’a alors que vingt-sept ans – pendant la bataille de Buzenval, le 19 janvier 1871, forge sa légende. L’École des Beaux-Arts fait alors ériger en ses murs un monument qui perpétue aujourd’hui le souvenir de celui qui apparaît à l’époque comme le meilleur espoir de sa génération.