La Guerre sur Mars, vers 1906
Encre de chine et gouache blanche sur papier Bristol
34,9 x 24,7 cm
Signé en bas à droite E. Bouard
Vendu
La seconde moitié du XIXe siècle est marquée par un saut technologique sans précédent. L’industrialisation massive du continent européen associée aux nombreuses innovations et découvertes scientifiques ne sont pas sans incidence sur la littérature et les arts. Jules Verne, auteur prolifique, compose des romans d’aventure qui, à l’image de son Voyage au centre de la Terre publié en 1864, mettent en avant ces progrès technologiques. Dès l’année suivante, l’écrivain aborde le thème du voyage dans l’espace avec De la terre à la Lune. Les dessinateurs travaillant pour l’éditeur Pierre-Jules Hetzel rivalisent de fantaisie pour illustrer le texte. À l’approche du siècle suivant, l’invention du cinéma offre à Georges Méliès, l’un de ses pionniers, un médium de choix pour à son tour mettre en image le texte de Jules Verne. Son film le Voyage dans la lune, réalisé en 1902, inaugure le genre de la science fiction à l’écran et attire les foules de curieux.
Arnould Galopin, né à Marbeuf en 1863, grandit en lisant les chefs-d’œuvre de Jules Verne et s’oriente, devenu adulte, vers une carrière d’écrivain. Le Docteur Oméga, aventures fantastiques de trois Français dans la planète Mars (1906), reste l’un de ses romans les plus populaires. Il conte le voyage sur Mars d’un homme emporté malgré lui par la folie de son voisin, le docteur Oméga, dans une entreprise fantastique sur la planète rouge. À leur arrivée, le texte décrit un monde peuplé de nains : les Martiens. Le docteur détaille alors en scientifique les paysages, les villes et les structures sociales de la population indigène. Pour la première édition de l’ouvrage, les éditions Fayard font appel à Ernest-Auguste Bouard comme illustrateur. Reproduites en héliogravure d’après ses dessins à l’encre de chine, les planches s’insèrent dans le texte au fur et à mesure du récit. Pour illustrer le onzième chapitre consacré à la guerre sur Mars, Bouard représente une montagne à la noirceur sinistre. Sur la plaine, une multitude de petits personnages s’effondrent, frappés par des rayons blancs pro- venant des rochers, grattés par l’artiste dans la surface du papier. L’auteur décrit l’épisode : « Chaque soldat martien avait en main une boîte carrée et cette boîte était son arme. (…) Rien n’était effrayant à voir comme ces gnomes qui s’incendiaient à distance en braquant devant eux une sorte de Kodak. »
Arnould Galopin connaîtra la consécration en recevant après la Première Guerre mondiale le prix de l’Académie française pour son roman Sur le front de mer, dont le style en- gagé est sans rapport avec celui du Docteur Oméga. De son côté, Ernest Bouard, ancien élève de Léon Bonnat et Jules Lefebvre à l’École des Beaux-Arts, participe au Salon en 1895 et 1898. Abandonnant la peinture, il se consacrera finalement à une carrière d’illustrateur.