Boieldieu et la Dame blanche, vers 1825
Lavis d’encre et gouache blanche
34 x 19 cm
Signé en bas à droite F. Richard
Vendu
Nous tenons à remercier Monsieur Gérard Bruyère du musée des beaux-arts de Lyon pour son aide précieuse dans l’identification du sujet de cette oeuvre.
Sous les voûtes d’un édifice gothique en ruine, un homme assis, plume à la main, écoute une vieille femme lui désignant différents personnages à l’arrière-plan. À travers une baie en partie détruite et dont les vitraux sont depuis longtemps absents, des archers en costume médiéval s’agitent autour d’une croix. Derrière eux, une forêt dense ferme la perspective et laisse entrevoir un ciel laiteux. Plus en avant, éclairé par une ouverture percée dans la voûte effondrée, un homme seul, portant l’uniforme des mousquetaires du XVIIe siècle, lève les yeux vers la gauche de la composition. Le massif pilier qu’il semble regarder, cache, affleurant le bord de la feuille, une figure de jeune femme éthérée dont les pieds ne touchent pas le sol. Évanescente et drapée, cette apparition fantomatique porte le nom de dame blanche.
La légende de la «Dame blanche» est commune à la plupart des folklores européens. Entité surnaturelle quelquefois bienveillante, mais le plus souvent néfaste, elle donne son titre à un opéra-comique créé le 10 décembre 1825 par François-Adrien Boieldieu sur un livret d’Eugène Scribe. Le projet, s’inspirant de deux romans gothiques de Walter Scott, Guy Mannering ou l’Astrologue (1815) et surtout Le Monastère (1820), est amorcé en 1821. Dès sa première représentation l’œuvre connaît un véritable triomphe et sera jouée plus de cent fois l’année suivante avant d’intégrer le répertoire des plus prestigieux théâtres internationaux. Typique du style troubadour pour lequel le public faisait preuve d’un véritable engouement, La Dame blanche mêle la légèreté des opéras-comiques français du XVIIIe siècle aux tourments fantastiques du romantisme naissant.
L’œuvre reste encore aujourd’hui un modèle du genre dont l’influence sur le Robert Le Diable de Meyerbeer en 1831, puis sur toute une génération de compositeurs, de Bizet à Delibes en passant par Wagner, est indéniable. Fleury-François Richard, peintre, représentant majeur du style troubadour en France, choisit d’installer le compositeur, au portrait reconnaissable, dans une architecture qui s’inspire de celle du couvent des Cordeliers de l’Observance à Lyon. En accumulant les détails et les jeux de lumière dans un espace réduit et resserré, l’artiste fait preuve des qualités d’un enlumineur. Provenant d’une collection de dessins de l’école lyonnaise constituée autour de 1830, l’œuvre est probablement l’une des feuilles les plus ambitieuses et les plus abouties de l’artiste.