Philippe MARBEAU (1807-1861)
La statue du Bon Roi René à Aix-en-Provence, 1835
Huile sur papier marouflé sur toile
59,5 x 48,5 cm
Signé et daté en bas à gauche Marbeau 35
Surnommé le Bon Roi René par ses sujets, René 1er d’Anjou a laissé en Provence le meilleur souvenir. Au XVe siècle, il offre la prospérité à Aix-en-Provence où il entretient une cour littéraire, artistique et savante dont la ville conserve encore les traces aujourd’hui. Au début des années 1820, le conseil municipal décide d’orner le cours Mirabeau d’une fontaine à l’effigie du bon roi et fait appel à un Angevin pour réaliser la sculpture. Œuvre de David d’Angers sur un modèle de Pierre-Henri Révoil, le monument est inauguré par la duchesse d’Angoulême le 19 mai 1823. Représenté un sceptre dans la main droite et une grappe de raisin dans la gauche, le roi se tient debout sur un piédestal. À ses pieds, des livres et une palette de peintre rappellent son amour des arts.
En 1835, le peintre Philippe Marbeau, originaire de Brivela-Gaillarde, vient de s’installer en Provence. Ancien élève de François-Édouard Picot à Paris, il se lie d’amitié avec le peintre Émile Loubon, originaire d’Aix-en-Provence et proche de François-Marius Granet. Cette vue du haut du cours Mirabeau, réalisée à l’huile sur papier, se concentre sur la fontaine inaugurée treize ans plus tôt. Sur la place qui prendra plus tard le nom de Forbin (un Aixois, ancien élève de Jacques-Louis David et directeur du Louvre sous la Restauration), la sculpture de marbre se détache sur un fond ocre de façades et un ciel bleu traversé par les nuages. À l’arrière-plan à droite, on peut apercevoir le fronton de l’église des Oblats et le commencement de la rue d’Italie. Sur la gauche, un autre détail attire le regard. À cette époque, la partie droite de l’Hô- tel du Poët est occupée au rez-de-chaussée par une imprimerie-librairie réputée, la maison Remondet, dont on aper- çoit l’enseigne. Sous le porche, une foule s’est amassée pour admirer tableaux, gravures et placards accrochés à même la façade. Plus surprenante est la présence d’un taureau venu s’abreuver à l’eau de la fontaine. Ce dernier détourne la tête vers un pot de terre brisé à la base du bassin et semble hésiter entre le liquide répandu et l’eau claire qui s’écoule du socle du monument. Cette saynète aux atours de fable est la probable illustration d’un proverbe : Il faut boire le vin comme un roi et l’eau comme un taureau. Le peintre montre ici que la nécessité de la soif se passe des bonnes manières d’un roi.
Installé définitivement en Provence, Philippe Marbeau devient un Marseillais d’adoption et participe régulièrement au Salon entre 1842 et 1855. Membre de l’académie du Var, il reçoit pour ses œuvres quelques commentaires élogieux. Certains de ses contemporains mentionnent qu’éternellement insatisfait de son travail, il peignait jour et nuit et devint irascible et instable. Épris de son art jusqu’à la folie, il termina ses jours dans un asile marseillais.