Édouard DEBAT-PONSAN (1847-1913)
Étude de tête pour Messaline, 1870
Pierre noire sur papier
25 x 35 cm
Vendu
Messaline fut l’une des figures les plus sombres de l’histoire romaine. En 48 de notre ère, alors qu’elle était encore mariée à l’empereur Claude, elle épousa en secret Caius Silius, un jeune et beau soldat. Narcisse, le plus fidèle conseiller de l’empereur, décida de laver cet affront en ordonnant l’exécution de l’infidèle. Pourchassée, Messaline se réfugia auprès de sa mère qui lui conseilla de se suicider. Rattrapée par Narcisse, elle fut sauvagement poignardée par un soldat de la garde impériale, sous les yeux de sa mère et de son dénonciateur.
En 1870, année de la chute de Napoléon III, les membres de l’Institut choisirent d’imposer ce sujet pour le Prix de Rome de peinture. Le destin des deux empires, l’antique et le contemporain, purent se rencontrer dans l’esprit des candidats. Le jeune peintre Édouard Debat-Ponsan, profondément républicain, prit part aux combats de 1870. Ancien élève de Cabanel, il fit partie des artistes sélectionnés pour prétendre au Grand Prix de cette même année. Sa proposition pour La Mort de Messaline est disparue mais nous connaissons sa composition grâce à deux dessins d’ensemble. Le premier, sur calque, est conservé à l’École des Beaux-Arts et le second, sur papier bleu, est en collection privée. Ces feuilles montrent les hésitations du peintre quant à l’attitude à donner à la figure tragique de Messaline. Le dessin que nous présentons, d’une grande puissance graphique, présente deux études différentes du visage de la victime au moment de son assassinat. À gauche, la jeune femme regarde effrayée mais résignée celui qui va la tuer, à droite ses yeux se détournent et semblent fuir la fin inéluctable. Dans les deux cas, sa main gauche cache une partie de son visage.
Debat-Ponsan échoua cette année-là comme lors de ses six autres participations au concours, et c’est Fernand Lematte qui obtint le Grand Prix. Cette absence de consécration au terme de sa formation n’empêcha pas l’artiste de connaître le succès en son temps. En 1898, son choix d’exposer au Salon La Vérité sortant du puits apparut comme un véritable manifeste pour la cause dreyfusarde. Le tableau fut offert grâce à une souscription à Émile Zola, autre ardent défenseur du capitaine Dreyfus. Il est aujourd’hui conservé au musée de l’Hôtel de Ville à Amboise.