Téofil KWIATKOWSKI (1809-1891)

Allégorie de la souffrance face au deuil
Dernier hommage à Chopin, 1850
Encre et aquarelle sur papier
13,5 x 17,5 cm
Signé et daté en bas à gauche

Après des études à l’école des Beaux-Arts de Varsovie, Téofil, membre d’une famille noble polonaise, s’engage dans l’armée d’insurrection contre l’envahisseur russe. La défaite le contraint à l’exil et il rejoint la France avec cinq mille autres réfugiés polonais en 1832. D’abord parqué en Avignon, il obtient le droit de gagner Paris où il rencontre le poète Adam Mickiewicz. Très rapidement, il fait la connaissance du plus célèbre Polonais vivant à Paris : Frédéric Chopin. A partir de 1834, Téofil réalise de lui plusieurs portraits considérés comme les représentations les plus fidèles et les plus intimes du célèbre pianiste. À la mort de Chopin, le 17 octobre 1849, Téofil exécute devant sa dépouille plusieurs dessins qui connurent un immense succès. Les obsèques grandioses eurent lieu à l’église de la Madeleine ; le cortège accompagnant le char funèbre jusqu’au cimetière du Père Lachaise réunit plus de trois mille personnes. En 1850, un comité fut constitué afin d’ériger le monument funéraire définitif. Avec Delacroix, Kwiatkowski en fut l’un des membres et c’est Auguste Clésinger qui fut chargé de sa réalisation. Notre aquarelle datée de cette même année illustre les différentes expressions de la douleur face au deuil. Au centre, assise sur un rocher, une femme étouffe ses larmes entre ses mains, telle l’Euterpe qui surmonte le tombeau du pianiste, tandis qu’au-dessus d’elle, une autre mord sa main pour retenir ses cris. Deux anges consolateurs les accompagnent. À l’arrière-plan sur la droite, Marie-Madeleine à genoux, dénudée devant la tombe, lève les bras au ciel et ne peut retenir une souffrance visible. Téofil, qui jouit d’une grande célébrité en Pologne, reste encore aujourd’hui méconnu en France. Avec amusement, Théophile Gautier proposait déjà en son temps une explication à cet oubli: «le Polonais Théophile Kwiatkowski serait fort connu s’il jouissait … d’un nom prononçable».