Émile DELOBRE (1873-1956)

Orphée, vers 1895-1898
Huile sur panneau
31 x 26,5 cm
Signé en bas à droite Emile Delobre

Vendu

Né à Paris en 1873, Émile Delobre intègre l’École des Arts décoratifs à l’âge de quatorze ans, avant d’entrer aux Beaux-Arts où il suit l’enseignement de Gustave Moreau aux côtés de Matisse, Marquet, Rouault et Dufy. Il fréquente également l’atelier de Fernand Cormon dont il sait habilement copier le style. Au cours de sa carrière, Delobre reçoit divers prix – dont le prix Chenavard – et expose dès 1893 au Salon. En 1895, voyant la fin de sa vie approcher, Gustave Moreau souhaite transformer sa maison-atelier du 14 rue de La Rochefoucauld en musée et demande à Delobre de le seconder. Avec son aide, il entreprend la réalisation de plusieurs toiles de grand format et rédige des notices explicatives à l’intention des futurs visiteurs. Durant les trois années qui précèdent la mort du maître, le jeune Émile Delobre va se consacrer à cette tâche. Certains témoignages permettent d’attester l’intervention de l’élève dans les dernières œuvres de Gustave Moreau. Selon le peintre Georges Desvallières, le 2 avril 1898, soit deux semaines avant la mort de Moreau, ce dernier fait venir Delobre à son chevet pour lui demander de retoucher une Salomé. Le jeune peintre maîtrise alors parfaitement la technique de son ancien professeur au point de signer de son nom certaines études préparatoires, à l’image du carton pour Les Lyres mortes en 1896. 

À la même époque, Émile Delobre réalise plusieurs œuvres directement inspirées par Moreau, tant par leur style que par le choix des sujets. Le thème d’Orphée, si souvent traité par son maître, apparaît dans une toile intitulée La Mort du poète que Delobre expose au Salon de 1896. Il reprend ce sujet dans une petite peinture à l’huile sur panneau. Devant une végétation luxuriante faite d’empâtements verts, bleus, bruns et orange, le héros grec, les traits juvéniles, est ceint d’une couronne de lauriers qui se mêle à sa chevelure rousse. Parmi les nénuphars, sa tête flotte à la surface de l’onde ensanglantée. Son visage emprisonné par sa lyre est accompagné d’un cygne. Selon une variante du mythe, Orphée, inconsolable de la mort d’Eurydice, fut en effet métamorphosé par Zeus en cygne après sa mort. Pour la figure du héros, Delobre, comme Moreau pour son tableau de 1865, s’inspire d’un moulage d’après l’Esclave mourant de Michel-Ange. 

Après la mort de Moreau, Delobre ne connaît pas la carrière que son maître aurait pu lui souhaiter. Si, en 1906, un article de La Revue du bien dans la vie et dans l’art qui lui est entièrement consacré le qualifie de « fils de Gustave Moreau » et reproduit plusieurs de ses œuvres de jeunesse, le peintre vit principalement grâce à des commandes de copies d’après les maîtres anciens que lui passe l’État. Jusqu’à ses soixante-douze ans, Delobre, tombé dans l’oubli, travaille en tant que restaurateur pour le compte du galeriste Nathan Wildenstein. En 1984, dans The Art of the Forger, l’historien de l’art Christopher Wright le qualifie de faussaire et lui attribue la paternité du tableau La Diseuse de bonne aventure de Georges de La Tour conservé au Metropolitan Museum of Art de New York.

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