Jean-Baptiste AUBRY-LECOMTE (1787-1858)

Sous la direction d’Anne-Louis Girodet de Roucy-Trioson
Ariane abandonnée, vers 1822
Huile sur toile
38,5 x 46 cm
Historique : probablement la toile exposée en 1939 au musée Carnavalet sous l’attribution à Girodet : La Révolution française dans l’histoire, dans la littérature, dans l’art, Paris, musée Carnavalet, 1939, n°1058

Vendu

Au XIXe siècle, l’art du graveur avait deux destinations principales. La première, la gravure d’invention, incluait les caricatures, les scènes de genre et les vignettes d’illustration ; la seconde était dite d’interprétation. Dans ce cas particulier, le graveur devait, soit au burin soit en utilisant la technique nouvelle de la lithographie, retranscrire sur la plaque l’œuvre d’un peintre pour permettre sa diffusion par un éditeur. Jean-Baptiste Aubry-Lecomte, qui ne se destinait pas à une carrière artistique, étudia les mathématiques à Nice avant d’être employé au ministère des finances à Paris. S’adonnant au dessin en amateur, il rencontre Girodet qui devient son ami et son maître. Ce dernier insiste beaucoup pour que le jeune artiste intègre l’École des Beaux-Arts et c’est en tant que graveur et interprète des œuvres de Girodet qu’Aubry-Lecomte connut ses premiers succès. Au Salon de 1824, l’artiste présente deux lithographies réalisées sous la direction de Girodet : Ariane abandonné et Érigone endormie. Les deux œuvres présentées au Salon comme des pendants illustrent des thèmes mythologiques centrés sur deux figures féminines allongées. Les mentions au bas de la gravure de l’Ariane indiquent assez clairement la genèse d’un travail de collaboration. Le pluriel delineaverunt utilisé en lieu et place du traditionnel delineavit (dessiné par) insiste sur l’importance de l’implication d’Aubry-Lecomte dans la conception de cette œuvre, au-delà de la simple retranscription. Si le musée de Montargis conserve de la main de Girodet un dessin préparatoire pour la figure d’Ariane, il n’existe aucune œuvre achevée du maître sur ce thème qui aurait pu servir de modèle au graveur. Cependant, Sylvain Bellenger mentionne en 2006 dans le catalogue de l’exposition Girodet du Louvre qu’Aubry-Lecomte se serait servi d’un modèle peint spécifiquement pour l’Ariane. Les différences entre le dessin de Girodet et la composition finale de la lithographie sont multiples et suggèrent effectivement l’existence d’une étude intermédiaire. C’est Aubry-Lecomte qui se chargea donc de cette esquisse sous la direction de son ami. La figure d’Ariane endormie, dont le dessin sous-jacent reste visible, n’est que partiellement mise en couleur et reste inachevée, au contraire du paysage que le peintre a traité jusque dans les moindres détails — chaque feuille, fleur, et brin d’herbe étant clairement identifiables. Cette peinture, qui fut probablement celle exposée à tort sous l’attribution à Girodet au musée Carnavalet en 1939, répète le modèle de la Naïade couchée pour les décors du château de Compiègne et intègre le vaste corpus des figures endormies dans l’œuvre de Girodet.

 

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