Charles RAMELET

Le Roman,1833
Crayon et lavis d’encre sur papier
21,8 x 17,8 cm
Signé en bas à droite Ch Ramelet

Acquisition par la BNF

En mars 1832, Honoré Daumier est condamné à six mois de prison et cinq cents francs d’amende suite à la publication de l’une de ses caricatures. Celle-ci, parmi les plus célèbres de l’auteur, représentait le roi Louis-Philippe en Gargantua. D’abord jugé fou, il purge sa peine dans un asile de la rue Pigalle avant d’être transféré à la prison Sainte-Pélagie, en compagnie d’autres artistes et écrivains. Durant son incarcération, on lui laisse le loisir de dessiner. Charles Ramelet, l’un de ses plus anciens amis, récupère ses croquis. Daumier n’avait que quatorze ans lorsqu’il fit la connaissance de Ramelet, son aîné de trois ans. Tous deux jeunes élèves de l’académie Boudin en 1822 se lièrent d’une profonde amitié et Ramelet enseigna à Daumier les bases de la lithographie telles qu’il les avait lui-même apprises chez l’éditeur Belliard. Les deux artistes fournissent à ce dernier des planches musicales et des illustrations anonymes dans l’esprit de Charlet. Après avoir contribué au journal La Silhouette dès 1829, Daumier répond à l’appel de Charles Philipon qui vient de créer La Caricature, journal satirique ouvertement opposé à la monarchie de Juillet. Son ami Ramelet le rejoint rapidement comme contributeur.

Durant son emprisonnement à Sainte-Pélagie, Daumier réfléchit à une série de lithographies dont le thème général, en apparence fantaisiste et non polémique, aura pour titre L’Imagination. Chaque scénette, en une image, confronte un personnage de grande taille avec plusieurs figures en miniatures sur le modèle de Gulliver et les Lilliputiens. Ramelet, chargé de récupérer ces dessins lors de ses visites, les lithographie de retour à son atelier. Philipon, qui entre-temps a créé un nouveau quotidien, Le Charivari, accueille les planches avec enthousiasme et les publie au fur et à mesure de leurs livraisons. Si toute la série de L’Imagination passe aujourd’hui pour être l’invention de Daumier, plusieurs éléments laissent supposer que l’implication de Ramelet a pu dépasser la simple retranscription sur la pierre. Fin 1832, Philipon publie dans Le Charivari une lithographie qui utilise déjà ce système d’opposition entre grandes et petites figures. Titrée Le Bon Diable elle est signée Ch. Ramelet. Seuls quelques rares tirages des planches de la série de L’Imagination portent le célèbre monogramme h.D souvent ajouté plus tardivement. Ce n’est pas le cas pour celle intitulée Le Roman. L’existence d’un dessin, préparatoire pour cette planche, signé de la main de Ramelet, atteste qu’il fut l’inventeur de cette composition, éventuellement sur une idée de Daumier.

Une jeune femme vêtue d’une large robe blanche, laissée en réserve sur la feuille, vient d’interrompre sa lecture d’un roman et ferme les yeux. Son imagination poursuit l’histoire qui prend vie sous forme de petites figures à ses pieds. Tracée au lavis d’encre, la composition est inversée et doit donc se lire telle qu’elle sera finalement imprimée. Un sous-titre apposé sous la lithographie accompagne la lecture de l’image : Ils se battent pour moi… Alfred m’enlèvera… Nous nous marierons…

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