Mathilde BONAPARTE (1820-1904)

Portrait de jeune femme, 1883
Aquarelle sur papier
33 x 24 cm
Signé et datée en bas à droite Mathilde / 1883

Artiste accomplie exposant ses œuvres au Salon sous le Second Empire, Mathilde Bonaparte fut surnommée affectueusement par Sainte-Beuve « Notre-Dame des Arts ». Fille de Jérôme Bonaparte et de Catherine de Wurtemberg, la princesse Mathilde est née en 1820, un an avant la mort de son oncle Napoléon Ier, emprisonné sur l’île de Sainte-Hélène. Elle passe son enfance en exil entre Rome et Florence. Après avoir été fiancée à son cousin, le futur Napoléon III, elle épouse à vingt ans le comte Anatole Demidoff, un riche collectionneur russe. Rapidement séparée de son mari violent, elle s’installe à Paris en 1846 avant d’obtenir le divorce l’année suivante. La révolution de 1848 et l’élection de son cousin comme premier président de la République offrent à Mathilde un rôle de premier plan avant même l’instauration du Second Empire. La pension que lui verse son ex-mari lui permet de vivre dans le faste entre son hôtel particulier parisien et son château de Catinat à Saint-Gratien. Les peintres Jean-Léon Gérôme, Charles et Eugène Giraud, le jeune sculpteur Jean-Baptiste Carpeaux et des écrivains tels que Théophile Gautier, Gustave Flaubert ou les frères Goncourt font partie des habitués de la rue de Courcelles où la princesse les reçoit chaque mercredi. À cette époque, elle s’affiche dans le Tout-Paris au bras de son amant, le comte Émilien de Nieuwerkerke, artiste devenu surintendant des Beaux-Arts. Ce dernier conseille Mathilde qui, comme collectionneuse, accumule peintures et objets d’arts. 

Ayant reçu depuis l’enfance une éducation propre à celle des jeunes filles de la noblesse, la princesse manie le crayon et le pinceau avec une prédilection pour l’aquarelle. Refusant de cantonner sa pratique à un simple loisir féminin, elle produit des compositions originales et ambitieuses en quête d’une certaine forme de reconnaissance. En 1859, elle participe pour la première fois au Salon où elle expose trois aquarelles : deux portraits de femmes et une copie d’après Rembrandt. À cette occasion, elle se présente comme élève d’Eugène Giraud. Mathilde reçoit même une médaille officielle en 1865 pour l’une de ses œuvres. Restée à Paris malgré la chute du Second Empire en 1870, la princesse poursuit ses activités artistiques comme le montre un portrait à l’aquarelle daté de 1883. 

Devant l’artiste, une jeune fille d’une quinzaine d’années prend la pose. De face, elle nous fixe avec ses yeux noirs. Ses longs cheveux bruns détachés tombent sur ses épaules couvertes d’un chemisier clair ouvert sur la poitrine. Ses traits tendres de jeune paysanne méditerranéenne contrastent avec la dureté de son regard qui évoque l’héroïne vengeresse, Colomba, dans la nouvelle de Prosper Mérimée.

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