Henry MONNIER (1799-1877)

La Lecture, 1834 
Lavis d’encre sur papier
13,5 x 12,8 cm
Signé et daté en bas à gauche Henry Monnier / […] juin 1834

Vendu

Henry Monnier commence à travailler à dix-sept ans au ministère de la Justice. Assis derrière un bureau, il s’ennuie et le soir venu, il sort, va au théâtre, à l’opéra ou fréquente les ateliers des peintres Gros et Girodet. Il croise à cette époque Delacroix et Géricault, futurs chefs de file du romantisme. En 1821, Monnier abandonne définitivement sa carrière dans l’administration et publie ses premiers portraits d’acteurs. Pendant les cinq années qui suivent, il enchaîne les allers-retours entre Londres et Paris tout en commençant à vivre de la vente de ses dessins. Devenu une figure du Paris artistique et littéraire, il peut compter parmi ses amis Alexandre Dumas, Théophile Gautier, Prosper Mérimée ou Honoré de Balzac. Habile dessinateur, il croque les mœurs hautes en couleur de la vie parisienne et capture sur la feuille la physionomie des célébrités de son temps comme celle d’illustres inconnus. Quelquefois isolées sur la page et représentées en pieds, ces figures se retrouvent le plus souvent associées par groupes et mises en scène dans des intérieurs obscurs. 

En 1831, Monnier entame une carrière d’acteur à Paris sur la scène du théâtre du Vaudeville, puis en tournée à travers toute la France et la Belgique. Pendant cette période, il délaisse son activité de lithographe. Durant un séjour à Bruxelles, l’artiste rencontre la comédienne Caroline Linsel. Le couple, de retour à Paris en juin de cette même année, peine à trouver des contrats dans les théâtres de la capitale. Désœuvré, Monnier a alors tout le temps pour réaliser l’un de ses plus étranges dessins. Tracée au lavis d’encre noire dans un petit format presque carré, l’œuvre présente deux personnages dans un salon sans décor. Le premier, dont il accentue la grandeur et la maigreur par un costume noir sans couture, est assis dans un fauteuil les jambes étendues. Il tient dans sa main un ensemble de feuillets dont il prend connaissance et semble glisser sur son fauteuil au fil de la lecture. Est-ce d’ennui ou sous le poids de la nouvelle que sa bouche se tord et que son regard se perd ? Sur sa gauche, un serviteur en livrée vient de lui apporter un plateau. Visiblement désabusé, il ne semble pas se soucier des préoccupations de son maître et n’attend qu’un geste pour quitter la pièce. Le sens de ce type de représentations n’est pas toujours évident. 

L’œuvre qui s’inspire du théâtre de boulevard partage avec lui une gestion resserrée de l’espace. En 1852, les frères Goncourt, dans Mystères des théâtres, appellent ces compositions de Monnier des « Salons sombres » qu’ils définissent « comme des conversations niaises où l’on ne dit rien ».

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