Alexandre-Évariste FRAGONARD (1780-1850)

La Romance de cherubin, vers 1827
Lavis d’encre sur papier
14,5 x 18,2 cm

Vendu

Le fils de Jean-Honoré Fragonard connut la célébrité et la reconnaissance à une époque où son père tombait peu à peu dans l’oubli. S’il reçut ses premières leçons dans l’atelier paternel, c’est auprès de Jacques-Louis David qu’il se forma au métier. Peintre mais également dessinateur, sculpteur et lithographe, il collabora dès 1806 et pendant plus de trente ans avec la Manufacture de Sèvres. Tout au long de sa carrière, Alexandre-Évariste Fragonard évolue en fonction des modes et des régimes : néoclassique zélé sous l’Empire, il adopte rapidement le style troubadour pendant la Restauration. Fragonard participe comme illustrateur aux premiers volumes des  Voyages pittoresques […] dirigés par Nodier et Taylor. Il collabore également avec des éditeurs pour réaliser des séries thématiques gravées. C’est le cas en 1819 pour l’album Voyage au Levant lithographié par Engelmann. Fragonard qui s’intéresse depuis longtemps au monde du spectacle avait déjà réalisé des portraits de comédiens ainsi que des projets de costumes pour l’Opéra. En 1827, il reçoit la commande d’un ensemble de dessins illustrant Le Barbier de Séville et Le Mariage de Figaro d’après les pièces de Beaumarchais. Ces compositions, fournies à l’imprimeur et lithographe Charles Villain, furent traduites sur la pierre.

Pour Le Mariage de Figaro, seconde pièce de sa trilogie, écrite en 1778,  Beaumarchais avait rédigé des didascalies très précises en insistant sur sa vision des costumes pour chaque personnage. Dans la quatrième scène de l’acte II, il note que le jeune Chérubin doit porter le riche vêtement (…) d’un page de cour espagnole, blanc et brodé d’argent ; un léger manteau bleu sur l’épaule, et un chapeau chargé de plumes. Dans son dessin, Fragonard respecte scrupuleusement les indications de l’auteur pour représenter l’adolescent au moment où il va entonner la lecture de sa romance sur l’air de Malbrough s’en va-t-en guerre. La comtesse, dont il est amoureux et à qui il annonce son départ, est assise face à lui près d’une somptueuse table de toilette. Fragonard lui offre les traits de Violante Palma, le modèle pour la Flore de Titien. De sa main gauche, la comtesse repousse d’un geste évocateur son petit chien, symbole traditionnel de la fidélité. La bonne Suzanne complète le tableau en accompagnant le chant de Chérubin par quelques notes de mandoline.

Nous savons que Beaumarchais s’inspira lui-même pour construire cette scène de la composition du tableau La Conversation espagnole du peintre Carle Van Loo qu’il connaissait par la gravure. Alexandre-Évariste Fragonard transpose sa vision de La Romance de Chérubin dans un intérieur de style Renaissance aux accents plus italiens qu’espagnols, en multipliant les références à Raphaël pour le visage de Chérubin et à Titien pour celui de la comtesse.

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